Et la palme de la plus cruelle déception est attribuée à… James Gray! Pour son cinquième long-métrage (et sa quatrième sélection cannoise), le successeur désigné de Martin Scorsese et de FFCoppola inflige aux festivaliers un mélo, lent, long lisse et ennuyeux, sur fond d’immigration polonaise, de péché et de pardon. Les Deux Orphelines sauce polar.
En 1921, Ewa (Marion Cotillard) et sa sœur Magda débarquent à Ellis Island après un voyage cauchemardesque au cours duquel Ewa a été violée.Accusée de s’être prostituée à bord, Ewa est refoulée et Magda, qui est atteinte de tuberculose, est placée en quarantaine avant d’être à son tour expulsée. L’affaire se présente donc plutôt mal.Heureusement (?), intervient Bruno (Joaquin Phœnix), un maquereau qui soudoie les douaniers pour agrandir son cheptel. Ewa accepte, bon gré mal gré (plutôt « mal Gray » d’ailleurs), de se prostituer pour lui, à condition qu’il fasse aussi sortir sa sœur. S’en suivent diverses péripéties, au cours desquelles le mac-au-cœur-tendre tombe raide dingue de la putain-malgré-elle, tandis que celle-ci est tentée de se faire la belle avec un beau prestidigitateur (Jeremy Renner), dont les intentions ne sont pas claires.Ewa, qui comme Ophélie a gardé la Foi, passe à confesse déguisée en madone et obtient la grâce divine contre un pater et trois avés. Les deux mâles ennemis s’affrontent, le plus méchant meurt et tout est bien qui finit bien. Le tout admirablement filmé, dans un clair-obscur signé de l’indispensable Darius Khondji, plutôt bien joué (Marion Cotillard est mieux que dans Blood Ties - ce qui n’est pas difficile- et Joaquin Phœnix se retient d’en faire trop jusqu’à la dernière demi-heure), mais d’un ennui mortel.
Comme il l’avait fait avec succès dans l’admirable Two Lovers, le réalisateur prodige de Little Odessa et de La Nuit nous appartient a apparemment voulu « détourner les codes du genre », en n’employant aucun des procédés habituels : pas de scène de sexe, presque pas de violence, assez peu de larmes, mais beaucoup de bondieuseries quand même.Le problème, c’est que ça ne fonctionne pas du tout! On ne croit pas une seconde à l’histoire, ni aux motivations des personnages.Tout parait artificiel, théâtral, surjoué.À la fin, il y a une scène assez allégorique: Ewa et Bruno retournent à Ellis Island chercher Magda.Leur bateau a une voile, mais c’est en ramant qu’ils y vont. James Gray fait pareil: il rame. Et c’est le spectateur qui écope!
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