Un deuxième prix d’interprétation consécutif? Ce serait une première, mais qui mieux que Mads Mikkelsen pourrait y prétendre?
Couronné l’an dernier pour sa prestation d’éducateur pour jeunes enfants soupçonné de pédophilie dans le film de Thomas Vinterberg, La Chasse, l’immense acteur danois est, encore une fois, très en valeur dans le nouveau film d’Arnaud des Pallières, Michael Kohlhaas.
Il incarne un éleveur de chevaux du XVIe siècle très à cheval (justement) sur le code de l’honneur, qui va rentrer en guerre contre un baron local parce qu’il a essayé de l’escroquer et a maltraité deux de ses chevaux (il est aussi responsable de la mort de sa femme, mais c’est subsidiaire…).
Arnaud Des Pallières (Adieu, Le Narrateur, Poussières d’Amérique) en fait un héros de tragédie grecque presque mythologique et filme le moindre de ses froncements de sourcils comme s’ils allaient déclencher la colère de Dieu. Il y a d’ailleurs beaucoup d’ Aguirre (Werner Herzog vintage) et pas mal de Bergman dans Michael Kohlhaas, film français en costumes, qui renouvelle quelque peu le genre. Pas de grandes cavalcades, de flottements de cape et de duels à fleurets mouchetés ici.Tout est filmé au plus serré, dans une économie de moyens de dialogues et d’effets qui n’exclue pourtant pas une ambition esthétique immense.
Formellement, Michael Kohlhaas s’apparente par sa solennité et sa lenteur à un grand film historique russe ou chinois.
Le réalisateur a tendance à abuser des filtres de lumière saturée (on le croirait coproduit par Instagram), de la brume artificielle et des tambours en fond sonore. Mais son film a sacrément de la gueule!Presqu’autant que ses acteurs : Mikkelsen et son profil taillé à la serpe (Le Jack Palance des temps modernes!), Guillaume Delaunay (Géant, le bien nommé), Mélusine Mayance (d’une grâce folle dans le rôle de la fille du héros), Roxane Duran (intrigante princesse), Sergi Lopez, Bruno Ganz, Denis Lavant et Amira Casar en caméos récréatifs.
Par moments aussi aride et brumeux que le massif des Cévennes où est censée se dérouler l’action (l’essentiel du tournage s’est fait en Lozère), Michael Kohlhaas laisse pourtant au spectateur une impression profonde.