À 67 ans, Pedro Almodovar est le plus célèbre et le plus titré des réalisateurs espagnols. Sa filmographie «éblouissante et iconoclaste» (sic), entamée en 1980 avec Pepa Lucy Bom et autres filles du quartier, compte 20 films et embrasse quasiment tous les genres (vaudeville, farce, tragédie, fantastique, comédie musicale, thriller) avec une prédilection pour les figures féminines (il a révélé Penélope Cruz, Marisa Paredes, Rossy de Palma, Carmen Maura et Victoria Abril), les secrets et la filiation.
César du meilleur film étranger 1993 pour Talons Aiguilles, César d’honneur 1999, Oscar du meilleur film étranger 2000pour Tout sur ma mère, Oscar du meilleur scénario 2003pour Parle avec elle, Prix du cinéma européen 2013, Prix Lumière 2014, Almodovar a présenté cinq films en compétitions à Cannes depuis 1999 mais n’a jamais décroché la Palme convoitée.
Il aurait dû l’avoir en 1999 pour Tout sur ma mère, qui est probablement son chef-d’œuvre.Mais cette année-là, le jury de lui a préféré Rosetta des frères Dardenne et il a dû se contenter du Prix de la mise en scène.Vexé, Almodovar ne reviendra sur la Croisette qu’en 2004 présenter (en ouverture de Festival mais hors compétition) La Mauvaise éducation, l’histoire de deux garçons victimes d’un prêtre pédophile. En 2006, il est de nouveau en compétition avec Volver mais ce sont ses actrices (Penélope Cruz, Carmen Maura, Lola Dueñas, Blanca Portillo) qui lui volent la vedette en emportant un prix collectif d’interprétation féminine.Il se console avec le Prix du scénario. Ce sera son dernier trophée cannois puisque, depuis, ni Les Étreintes brisées (histoire d’un réalisateur devenu aveugle en 2009), ni La Piel que habito (thriller fantastique avec Antonio Banderas en 2011), ni Julieta l’an dernier (une femme à la recherche de sa fille disparue) n’ont séduit les jurés. Il fallait bien au minimum une présidence du jury pour convaincre Almodovar que Cannes aime encore son cinéma et l’inciter à y revenir encore chercher la consécration suprême qui lui manque.