« La beauté est une arme » clame la top model Tasha Vasconcelos dans l’autobiographie qu’elle signe aux éditions Michel Lafon. Qui a déjà vu sa photo en Une de Vogue, de Elle ou de Marie Claire ne peut en douter: cette fille est canon. Mais pas seulement. Ambassadrice humanitaire multicartes et fondatrice d’Amor (Aide Mondiale Orphelins Réconfort), Tasha a ouvert et finance une clinique pour les mamans séropositives au Malawi. Alternant « supermodel talk » et confessions à fleur de peau, constamment entre rire et larmes d’enfant chassée de sa terre natale, elle parle de son retour en Afrique, de Monaco où elle a trouvé refuge, de son rapport à la beauté et aux hommes et de ses relations avec le monde futile et cruel de la mode...



« La beauté comme une arme », c’est un slogan?
Pas seulement. La beauté c’est mon métier. Un docteur a des outils, le mien c’est mon corps. Je me sers de ma beauté pour arriver à mes fins et aider le pays où je suis né. Elle m’a permis de franchir les obstacles et d’ouvrir les portes qu’il fallait pousser pour être utile. Autant être belle pour quelque chose.

D’où vous vient ce sens de l’engagement?
Il y a un saint dans la famille, j’assume mon héritage! (rires) J’ai été élevée avec des valeurs fortes, puis j’ai fait ce métier de mannequin un peu par hasard et par facilité. Mais je n’étais pas heureuse. Il y avait un grand vide en moi. Le déclic a été ma première mission pour l’Unicef en Bolivie en 1999. J’étais très mal dans ma peau quand je suis partie et j’en suis revenue transformée. J’ai senti pour la première fois que j’étais en train de faire quelque chose d’utile. Après, il y a eu la rencontre avec Dr Brooks, le moderne docteur Schweitzer, au Malawi. Il m’a dit : « Viens on va construire une clinique, sauver la vie des enfants et des mamans ». Et on l’a fait. Depuis, moi qui n’ai pas d’enfant, j’ai eu 746 bébés et le taux d’enfants séropositifs à la naissance baisse chaque mois.

Votre retour en Afrique a pourtant été douloureux, non?
L’Afrique m’a fait beaucoup de mal. J’y ai tout perdu. Ma famille a été chassée par deux guerres civiles, mon grand-père, que j’aimais tant, y a été tué. Retourner là-bas après 30 ans d’exil, ce n’était pas facile. Chaque minute du voyage, dans l’avion, j’ai revécu ce traumatisme d’enfant de 11 ans, obligée de tout quitter la nuit pour échapper à la guerre. Mais mon moteur, c’est le pardon. Quand la porte de l’avion s’est ouverte, j’ai su que j’étais de retour chez moi... Et l’accueil a été magnifique.

Pourquoi avoir choisi le Malawi plutôt que le Mozambique où vous êtes née?
Parce que j’ai rencontré le docteur Brooks qui travaillait déjà là-bas. Mais notre clinique n’est qu’à trois kilomètres du Mozambique. Ce sont les mêmes populations qui la fréquentent...

Aider l’Afrique est très tendance dans la jet-set…
C’est aussi pour casser cette image-là que j’ai écrit le livre. Je n’y vais pas pour poser avec un bébé noir dans les bras.Je ne suis pas Madonna, ni Angelina Jolie. Adopter un enfant africain c’est bien, mais c’est insuffisant. Je déteste tout le cirque qu’elles font autour de ça. Avec l’argent qu’elles dépensent pour venir en avion privé, on pourrait faire beaucoup de choses. Je pourrai le leur dire en face, j’ai le droit : c’est mon pays, je suis africaine. Moi, je construis. Tous les ans, je dois trouver 70000 euros pour faire tourner cette clinique. C’est difficile, mais j’en suis tellement fière.

Vous êtes plutôt sévère avec le monde de la mode…
Si on écrit un livre, il faut tout dire, sinon ce n’est pas la peine. Mannequin, c’est mon métier, mais je n’ai pas peur de dire que c’est dur, qu’on crève de faim tout le temps et qu’on se bouffe le foie entre nous parce que les places sont chères. On est quinze à ce niveau dans le monde : ça explique les coups bas. La première fois qu’elle m’a vue sur un plateau, Naomi Campbell m’a carrément fait virer. C’est une vraie peste!

Et Carla Bruni?
Je l’aime bien. On vient du même monde.Mais c’est une machine. Sous ses faux airs baba cool, elle n’a aucun état d’âme. Parfois j’aimerais avoir le quart de son ambition et de sa détermination. Un jour, on s’est retrouvées, toutes les top models, à Istambul pour un défilé Versace. Autant vous dire qu’on vous traite comme des princesses et que c’est à celle qui sera le plus gâtée. Comme par hasard, c’est encore Carlita qui avait la meilleure chambre à l’hôtel. Quand j’y suis rentrée, je n’en croyais pas mes yeux : on pouvait faire son jogging entre le lit et la salle de bains. Elle s’était débrouillée pour avoir la suite présidentielle! Déjà! C’était sans doute un signe (rires) Bref, je n’ai pas été étonnée outre mesure quand elle est devenue « première dame de France »...

Vous auriez pu devenir « première dame de Monaco », non?
Mais non! Albert et moi on est comme frère et sœur. Il est venu inaugurer ma clinique au Malawi et moi j’irai à son mariage. On a toujours été copains et seulement copains. À l’époque, j’étais invitée à toutes les cérémonies de la principauté, parce que je suis assez décorative, et, évidemment, toute la presse nous avait fiancés. Mais moi, pendant ce temps, j’avais des déjeuners secrets avec le Prince Charles et ça me faisait bien rire. Charles était charmant, mais il était engagé avec Camilla. Malgré ses avances courtoises, j’ai compris que c’était la femme de sa vie.

Pourquoi avoir choisi de vous installer en principauté?
Quand on a vécu ce que j’ai vécu enfant, on cherche un refuge. Je l’ai trouvé à Monaco. J’ai toujours besoin d’être rassurée, protégée, de me sentir en sécurité... À Monaco, je peux aller faire mon marché sans avoir peur d’être agressée. Et quand je regarde la mer de mon balcon, je crois encore être la petite Sandra, de retour dans sa maison de Beira (à cette évocation, les larmes lui montent aux yeux et sa voix se brise).