Il y a pourtant un fait méconnu à son sujet : c'est qu'il fut le seul ministre français de toute l'histoire de l’Éducation nationale à avoir encouragé l'enseignement de la Langue Internationale espéranto par une circulaire du 11 octobre 1938.
En cela, Jean Zay est comparable à Cai Yuanpei (1868-1940), ministre de l'éducation de Chine sous le gouvernement de Sun Yatsen en 1912. Le nom de Cai Yuanpei, qui fut recteur de l'Université de Pékin et premier président de l'Académie des sciences de Chine, conserve encore aujourd'hui l'image d'un réformateur et d'un grand démocrate. Un timbre-poste lui est consacré et un programme de l'Ambassade de France en Chine porte son nom. Il œuvra beaucoup pour la liberté d'expression, le droit des femmes, le recrutement d'un corps professoral de qualité et l'enseignement de l'espéranto qu'il avait appris en Allemagne de 1907 à 1911.

Jean Zay avait ainsi soulevé la chape de plomb qui s'était abattue sur l'espéranto le 3 juin 1922 lorsque Léon Bérard, ministre de l'Instruction publique, diffusa une circulaire interdisant l'usage des locaux scolaires pour les cours d'espéranto et pour sa promotion.

Un décret analogue fut signé dans la décennie suivante, le 17 mai 1935, par Bernhard Rust, ministre des Sciences, de l'éducation et de la formation populaire du Troisième Reich :

Le soutien aux langues auxiliaires artificielles mondiales telles que la langue espéranto n’a pas de place dans l’État national-socialiste. Son utilisation mène à l’affaiblissement des valeurs essentielles du caractère national. C’est pourquoi toute accélération de l’enseignement de telles langues est à éviter; les classes d’enseignement ne doivent pas être mises à disposition dans ce but.

Un décret du 18 février 1936, émis par Martin Bormann sur ordre de Reinhard Heydrich, interdit à tous les membres du parti national-socialiste et des organisations affiliées d’appartenir aux associations œuvrant pour une langue artificielle, ce qui frappa évidemment en premier lieu l’espéranto, du fait que cette démarche était “en contradiction avec les principes de base du national-socialisme“.

En fait, en 2015, en dépit du transfert des cendres de Jean Zay au Panthéon, c'est l'esprit de Léon Bérard, ministre de l'Instruction publique, qui devint ambassadeur du Régime de Vichy auprès du Saint-Siège, qui continue de planer sur l'Éducation nationale.