Roman Polanski a fait savoir hier qu’il renonçait à présider la 42e cérémonie des César, prévue le 24 février.Depuis l’annonce de sa désignation, plusieurs associations féministes (dont «Osez le féminisme») étaient montées au créneau pour dénoncer le choix de l’Académie des César, considéré comme «une insulte aux victimes de viol et d’agressions sexuelles». Reprise sur les réseaux sociaux, la polémique a rapidement fait flores avec un hashtag «BoycottCésar» largement partagé du Twitter, une pétition appelant à sa destitution qui a recueilli plus de 60000 signatures et un appel à manifester devant la salle Pleyel le soir de la cérémonie. Le réalisateur de 83 ans a donc préféré se retirer pour permettre à la cérémonie de conserver sa vocation de grande fête du cinéma français. Elle risque toutefois d’être un peu gâchée, car non seulement les César se voient privés à quelques semaines de la cérémonie d’une présidence prestigieuse, mais ils auraient pu faire l’économie d’une polémique qui ne grandira personne.
Depuis que la police Suisse, dans un élan de zèle encore inexpliqué, a réveillé en 2009, une affaire de viol vieille de 40 ans, en interpellant Roman Polanski à Zurich (1), il est devenu pratiquement impossible d’inviter quelque part le réalisateur de Rosemary’s Baby, de Chinatown, du Bal des vampires, du Pianiste et de quelques autres chefs d’œuvre du cinéma, sans déclencher une levée de boucliers. L’Institut Lumière à Lyon en a fait l’expérience l’an dernier, comme le raconte son directeur, Thierry Frémaux, dans son livre (2).Alors que la rétrospective de ses films avait attiré un public nombreux, la venue du réalisateur a suscité des protestations virulentes, notamment du planning familial. Pour Thierry Frémaux, qui a de nombreuses fois invité Polanski à Cannes (où il a reçu la Palme d’or en 2002 pour Le Pianiste), «Inviter Polanski n’est en rien lui exprimer une quelconque solidarité».Mais il semble que le réalisateur aux 8César et 4Oscars soit désormais «condamné à jouer pour toujours le rôle de coupable utile pour des causes qui n’ont rien à voir».
Ph.D

(1) Accusé en 1977 d’avoir violé une adolescente de 13 ans, Samantha Gailey, lors d’une séance de photos pour le magazine Vogue en Californie Roman Polanski a quitté le pays avant d’être jugé et est toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt de la justice américaine, bien que la victime ait à plusieurs reprises demandé l’abandon des poursuites. Interpellé en 2009 à Zurich, le réalisateur a été placé en résidence surveillée avant que la justice Suisse ne déclare irrecevable la demande d’extradition américaine.
(2) Sélection Officielle (Grasset)