Farouche gardien de la mémoire de sa grande sœur, Bruno s, dit Orlando, est à l’origine de Dalida, le film que Lisa Azuelos (LOL, Comme t’y es belle) a consacré à la chanteuse disparue et qui sort mercredi en salles.Un biopic (1) luxueux, qui rend un bel hommage au talent et à la beauté de Dalida, sans occulter les drames qui ont jalonné sa vie sentimentale.Le soir de l’avant-première à l’Olympia, Orlando n’a pu refréner son émotion.Trente ans après son suicide (le 3 mai 1987), l’aura de la chanteuse plane encore sur la mythique salle parisienne, dont elle détient le record de représentations. La projection du film et le tout-paris people qui se pressait sur le tapis rouge, n’ont fait que raviver son souvenir. Quelques heures plus tôt, Orlando, aujourd’hui âgé de 80 ans, nous racontait, avec sa verve et son humour coutumiers, l’aventure qu’a été la production de ce film, tout entier dédié à la gloire de sa sœur…
Qu’est devenu le projet de film américain, avec Nadia Farès dans le rôle de Dalida?
C’était trop long et compliqué.Je ne m’entendais pas avec le réalisateur et le scénario ne me plaisait pas.J’ai jeté l’éponge.J’avais même abandonné l’idée de faire un film, jusqu’à ce que je rencontre Lisa Azuelos, dont la vision m’a convaincue.J’aimais l’idée que ce soit une femme qui réalise ce film sur ma sœur .Le fait qu’elle soit la fille de Marie Laforêt et qu’elle connaisse bien ce milieu m’inclinait à penser qu’elle comprendrait ce qui s’est passé de manière intime et profonde.Lorsqu’elle m’a porté le scénario fini, j’en ai eu la confirmation.C’était parfait.
Sauf que vous n’aviez plus d’actrice…
Effectivement.Il a fallu lancer un casting énorme dans plusieurs pays.On a vu plus de 200 actrices avant de trouver la bonne.Quand on m’a présenté Zveva Alviti, j’avoue que je n’étais pas convaincu.Malgré sa grande beauté, c’était une parfaite débutante et elle ne parlait pas français. Mais quand on lui a fait chanter «Je suis malade» je suis tombé sous le charme. J’ai dit à la production «Elle sera Dalida, vous aviez raison d’insister!». Le premier jour du tournage, je lui ai envoyé un petit mot: «À partir d’aujourd’hui, j’ai une nouvelle petite sœur». Son interprétation de Dalida est tout simplement magistrale. Pour quelqu’un dont c’est la première expérience au cinéma, elle porte le film sur ses épaules. Elle est Dalida avec naturel, jamais dans la caricature. Elle s’est investie dans le rôle comme si c’était sa vie. Exactement comme l’aurait fait Dalida!

Ca a été plus simple pour trouver celui qui vous incarne: vous avez pris le plus beau!
Je vous jure que je n’y suis pour rien! (rires).J’avais proposé Riccardo Scamarcio, qui est une immense star en Italie, pour le rôle de Luigi Tenco (un des amours de Dalida N.D.L.R).C’est lui qui a insisté pour jouer mon rôle. Il est bien plus beau que moi…Mais il n’a pas mon sens de l’humour! (rires)
Êtes-vous beaucoup intervenu sur le tournage?
J’ai été très présent pendant la préparation, mais ensuite j’ai laissé une totale liberté à Lisa.C’est son film, pas le mien.Je ne suis pas resté plus d’un quart d’heure à chaque fois que je suis venu sur le plateau.Juste le temps d’accueillir les nouveaux arrivants et faire les photos souvenir. C’aurait été trop de pression pour Zveva et Riccardo de m’avoir en face.Il fallait qu’ils puissent travailler tranquilles.
Comment expliquer l’hiatus entre l’incroyable succès professionnel de Dalida et l’échec total de sa vie sentimentale?
Aujourd’hui, le mot star est galvaudé.Mais pour une star comme l’était Dalida, la vie personnelle devait être au même niveau que la vie professionnelle. Elle ne pouvait pas se contenter de moins. En France, deux artistes seulement ont été à cette hauteur: Piaf et Dalida. Plus que des chanteuses c’étaient des héroïnes pour le public.La vie de Dalida, c’est un opéra.Et malheureusement, comme beaucoup d’opéras, elle se termine tragiquement…
Sa mort était écrite, selon vous?
Quand elle fait le bilan de sa vie, elle s’aperçoit qu’elle a raté sa vie sentimentale, qu’elle n’a pas d’enfant, qu’elle ne peut plus en avoir.L’horloge commence à tourner à l’envers et elle ne supporte plus la créature qu’elle a créée.Ses dernières chansons sont presque prémonitoires: «Je suis malade», «Mourir sur scène» «A ma manière» «Pour en arriver là» Les auteurs sont comme des buvards, ils absorbent tout.C’est ce qu’elle leur inspirait quand elle les rencontrait. Mais comme elle était toujours adulée du public, personne ne mesurait la profondeur de sa détresse.Même pas moi, qui pourtant étais le plus proche. Je n’ai rien vu venir.Ce n’est qu’après que je me suis souvenu de ce que m’avait dit le docteur qui l’avait sauvée d’une première tentative, vingt ans plus tôt.«Elle est sauvée, mais rien ne dit qu’elle ne recommencera pas dans 20 ans».C’est ce qu’elle a fait, presque jour pour jour: un dimanche.