On avait failli l'oublier, vu le peu d'empressement de la France à le défendre dans l'imbroglio judiciaire qui l'a opposé à la Suisse et aux Etats Unis, mais Roman Polanski est un cinéaste français (né à Paris de parents polonais). Et bien que tourné en anglais, à l'étranger, avec des acteurs anglais (Pierce Brosnan, Ewan McGregor) et en co production avec l'Allemagne et l'Angleterre, The Ghost Writer est un film français, en même temps qu'un petit chef d'oeuvre de mise en scène hitchcockienne. Il avait donc parfaitement sa place parmi les nominés des César 2011, de la même façon que Tess et Le Pianiste, du même auteur, déjà césarisés par le passé. On pouvait même s'attendre à un nouveau doublé "meilleur réalisateur/ meilleur film". L'aura d'un cinéaste tel que Roman Polanski, au sommet de son art dans The Ghost Writer, écrasait toute concurrence. Seul Xavier Beauvois, avec Des Hommes et des dieux, auréolé d'un Grand Prix à Cannes, pouvait espérer faire bonne figure face à lui. Obnubilé par ses onze nominations, personne n'avait pas imaginé que Beauvois puisse repartir bredouille, ce qui aurait été cruel et injuste. C'est pourtant bien ce qui a failli arriver. Le César du meilleur film n'est arrivé qu'en dernière minute, comme une délivrance après un suspense terrible et deux maigres prix de consolation (meilleure photo et meilleur second rôle à l'immense Michael Lonsdale). Mais le grand vainqueur des Césars 2011 reste Roman Polanski avec quatre trophées prestigieux (meilleur réalisateur, meilleur montage, meilleure adaptation, meilleure musique). Un triomphe que, curieusement, personne n'avait anticipé pour un film que le réalisateur de Chinatown et Rosemary's Baby a terminé du fond de sa prison (ce qui donne une petite idée de sa maitrise).



3 César pour Joann Sfar
Avec trois César ( meilleur premier film, meilleur acteur, meilleur son, mais bizarrement pas meilleure musique ), le dessinateur Niçois Joann Sfar réussit quant- à lui une entrée prometteuse dans le monde du 7e Art. Son Gainsbourg, vie héroïque méritait effectivement tous les éloges... Et Laetitia Casta aurait bien mérité le César du second rôle pour sa composition en BB. Pour le reste , l'Académie des César a fait preuve, cette année, de beaucoup d'œcuménisme, en évitant une razzia à la Un Prophète, en jouant le renouvellement plutôt que la consécration ( Elmosnino plutôt que Depardieu ou Lambert, Sara Forestier plutôt que Deneuve) et en n'oubliant pas les comédies (3 César pour Le Nom des gens).
Il y eut néanmoins quelques perdants, comme Matthieu Amalric, dont le film Tournée et les comédiennes de Burlesque auraient mérité une récompense, Kervern et Delepine dont le Mammuth a été l'un des succès surprise de l'année, L'Arnacoeur comédie phare de l'année et surtout Guillaume Canet, ex- chouchou de la profession, auquel celle ci n'a visiblement pas pardonné le succès mal acquis des Petits Mouchoirs. Grand oublié des nominations malgré ses 5 millions d'entrées, son film ne décroche même pas le César du second rôle, qui semblait pourtant promis à l'impeccable Valérie Bonneton. Il lui reste sans doute quelques (petits) mouchoirs pour pleurer sur la versatilité de ses pairs.