Arrivera-t-il en taxi jaune, le 11 mai prochain au Palais des festivals? En 1976, Robert de Niro avait fait une entrée plutôt fracassante, à Cannes et au cinéma, dans le rôle de Travis Bickle, le chauffeur de taxi psychopathe de Taxi Driver. Le prix d’interprétation lui avait échappé, on se demande encore par quelle aberration (1), mais le film de Martin Scorsese avait raflé la Palme d’or et personne n’a oublié, depuis, sa composition.Trente-cinq ans plus tard, c’est en véritable « parrain » que de Niro reviendra sur la Croisette pour présider, du 11 au 22 mai, le 64 e Festival de Cannes.
L’annonce de sa nomination, hier après midi, a réjoui les habitués du Festival, les cinéphiles ainsi que ses nombreux amis de la Côte d’Azur qu’il fréquente avec assiduité depuis plus de trente ans.
Bien que sa carrière d’acteur ait connu ces dernières années plus de bas que de hauts (il est cette semaine à l’affiche d’une énième comédie vulgaire - Mon beau-père et nous- dans laquelle il recycle, une fois de plus, son personnage habituel de vieux dur à cuire psychorigide aux nerfs fragiles, inauguré en 1999 dans Mafia Blues), Robert de Niro est toujours considéré, à juste titre, comme l’un des meilleurs acteurs de la génération d’après Brando et James Dean.C’est aussi un réalisateur respecté (On lui doit Il était une fois dans le Bronx et Raison d’Etat) et il est le co-fondateur et le patron du trés branché Festival de Tribeca, à New York, véritable pépinière du cinéma indépendant US.

« J’adore Cannes! »
Pour Gilles Jacob et Thierry Frémaux, Président et Délégué général du Festival de Cannes, qui ont annoncé hier après-midi sa nomination : « Son nom restera associé à celui de Martin Scorsese, comme Mastroianni le fut à Fellini. Doté d’une plasticité de caméléon, il compose ses personnages sans qu’on sache s’il prend la mesure du rôle ou si le rôle s’adapte à ses mesures ». Une définition qui convient parfaitement au rôle qui lui a valu l’Oscar : celui de Jake la Motta dans Raging Bull, pour lequel il avait dû prendre (et reperdre) en quelques semaines plus de 35 kilos...
A 67 ans, cette présidence qu’il briguait déjà depuis plusieurs années (il était venu en 2008remettre la Palme d’or à Laurent Cantet et avait fait la clôture du Festival avec le film de Barry Levinson What Just Happened dans lequel il jouait... un producteur venu présenter son film à Cannes!) est une nouvelle preuve de la place importante que Robert de Niro occupe dans l’industrie cinématographique. « Ayant été par deux fois président de jury dans les années 80, je sais que ce ne sera pas une tâche facile pour mes amis jurés et moi-même mais je suis honoré et heureux du rôle qui m’est confié par le Festival de Cannes » a -t-il déclaré avec humour. Lorsqu’on lui avait demandé, à la sortie de La loi et l’ordre, son dernier film un peu sérieux (il y partageait l’affiche avec Al Pacino), s’il était toujours candidat à la présidence du Festival de Cannes, il nous avait répondu : « Bien sûr, j’adore Cannes! En plus, ça me permettrait de voir des films ».
Depuis, on a souvent recroisé Robert de Niro sur la Cote d’Azur, où il est encore venu, en mars dernier, donner une « Leçon de cinéma » à la cinémathèque de Nice et inaugurer l’exposition consacrée à son père au Musée Matisse. On se réjouit donc d’avance de le retrouver aux beaux jours sur la Croisette, où son rictus moqueur et son regard acéré devraient inspirer le respect.

(1) José Luis Gomez l’avait emporté, qui s’en souvient?