Vendredi nous faisons une sortie à Nantes, pour aller visiter le château des Ducs de Bretagne. En regardant sur internet j'ai vu qu'ils avaient des dossiers pédagogiques sur la traite négrière et ce sujet m'a paru intéressant. Pour les plus petits j'ignore ce qu'ils en retiendront, mais je me dis qu'ainsi ils en auront déjà entendu parler. Pour l'occasion j'ai demandé à Mamie Monique d'avancer le repas d'une demi-heure, car il y a très peu de trains : si nous n'attrapons pas celui de 13h28 le suivant n'est qu'à plus de 16h ! Petit moment de stress au départ : j'avais prévu assez large, mais c'était sans compter que la sortie du terrain serait barrée... Je retourne en courant dans la salle à manger pour récupérer le badge, qui est en fait dans la caravane de Bernard et Sylvie... une petite course digestive, il n'y a que ça de vrai !
Bruno nous emmène à une gare proche de Vallet, il me reste trois minutes pour acheter les billets de train mais nous finirons par arriver à monter dedans, et ensuite il n'y a qu'un petit quart d'heure de trajet jusqu'à Nantes.

En arrivant au château nous traversons un pont qui surplombe les douves asséchées, et là... en se penchant par-dessus Léon perd un pin's qui était accroché à son sac... Comme il n'y a pas de chemin apparent pour y aller, je lui dis que nous allons faire la visite tranquillement et que nous demanderons par où passer à la fin. Refait à neuf il y a quelques années, c'est un endroit bien pensé pour les groupes, avec des vestiaires gratuits où déposer sacs et manteaux, des toilettes pour les collectivités... ça n'a l'air de rien mais c'est fort appréciable ! Il y a aussi pas mal de technologie "moderne", avec notamment des ordinateurs et des écrans interactifs qui rencontreront un vif intérêt chez mes geeks en herbe ! Notons par exemple ces cartes interactives qui permettent de situer la ville dans sa région, par thème : photographie aérienne, carte hydrographique et du relief, anciennes cartes de 1750 et 1810...




Les enfants admirent une épée du 14ème siècle, découverte lors de fouilles dans le château entre la première et la seconde guerre mondiale.

D'autres traces du passé nous font signe, comme cette belle gargouille :

Un peu plus loin, une maquette nous présente la ville de Nantes avec ses remparts, ses portes...


Le musée regorge également d'objets qui soulignent l'importance du port de Nantes dans le développement de la ville : maquettes de bateau, impressionnantes figures de proue, pistolets d'officier de marine (1760-1770), armes de bord et longue-vue (18ème siècle), tabatière (1791), outils de navigation comme boussole, sphère armillaire et compas (18ème siècle) ...









Une salle souligne le dynamisme de l'industrie agro-alimentaire de Nantes. On y remarque d'abord la "Tour-phare" LU, créée par l'architecte Auguste Bluysen en 1900, à l'occasion de l'exposition universelle de Paris.

Haute de 36 mètres, elle était surmontée d'une énorme boîte à biscuits de six mètres de côté, équipée d'une lanterne électrique. D'après ce que j'ai compris, c'est cette dernière pièce que nous pouvons observer sur la photo.

Non loin de là, une statuette publicitaire pour le chocolat Amieux, qui nous amène doucement, avec une figure de proue exposée juste à côté et divers mascarons, vers le thème que j'ai choisi comme fil conducteur pour cette sortie : l'esclavage.





En effet, Nantes a eu une part très importante dans le commerce triangulaire, et je trouvais intéressant d'aborder le sujet avec les enfants. Nous leur expliquons pour commencer le principe du commerce triangulaire, sur lequel j'ai fait travailler Augustin, Léon et Gabrielle hier. Nous observons également un ensemble d'objets liés aux produits importés comme le sucre, les épices, le café...
Ici, des ustensiles permettant de casser les pains de sucre : hachette (fin du 17ème siècle), marteau (début du 18ème siècle) et cisaille (début du 19ème siècle). D'autres objets retiendront notre attention, comme une cuillère en argent et un pot en porcelaine pour saupoudrer le sucre (1763 et première moitié du 18ème siècle), un sucrier en porcelaine (18ème siècle) et un moulin à café (18ème siècle) :






Un tableau est très représentatif de l'importance qu'il y avait à montrer sa consommation de produits coloniaux, comme cet homme qui en 1757 se fait représenter face à une table de bois précieux avec du sucre et du café, et donnant un sucre à ses chiens... so chic !


Nous rendons ensuite ce principe de commerce triangulaire et d'esclavage un peu plus concret en observant différents objets : des entraves, des "pointes anti-émeute" utilisées lorsque les esclaves tentaient de se rebeller durant les traversées à bord des navires négriers, des tableaux montrant que les propriétaires avaient droit de vie et de mort sur leurs esclaves...









Le "Code noir" est aussi présenté dans une vitrine (édition de 1742).

Je vous recopie l'intégralité de son cartel de présentation car je le trouve très intéressant : "En mars 1685 est promulguée une ordonnance qui instaure le cadre législatif et le statut légal de l'esclave dans la société française. Son principal auteur, Jean-Baptiste Colbert, remplit les fonctions de Premier Ministre du roi Louis XIV. Ce texte, qui fait de l'esclave "un être de Dieu" et en même temps un bien meuble, montre toute la difficulté de donner un statut d'esclave à un être humain dans la société chrétienne du 17ème siècle. Il témoigne surtout de l'importance économique du commerce des Noirs et de la nécessité d'organiser la société avec cette nouvelle composante, jusque-là peu développée dans l'Occident Chrétien : la possession d'un homme par un homme. L'ordonnance cherche à répondre à des questions pratiques : à qui appartiennent les enfants d'esclaves si les parents ont des maîtres différents ? Peut-on affranchir ses enfants issus d'une union avec un esclave ? Peut-on mutiler ses esclaves ? Est-on obligé de les baptiser ? Le Code Noir fut relativement peu observé dans les colonies françaises au 18ème siècle, les propriétaires estimant qu'il leur était trop souvent défavorable."
Un peu plus loin, un tableau nous laissera songeurs : une femme en train de percer l'oreille de son esclave. Après recherche internet en rentrant au cirque, je découvrirai que chez les Grecs, avoir l'oreille percée était le signe de l'esclavage. De même, dans l'ancienne culture marocaine, on mettait une boucle sur l'oreille droite des esclaves. Chez les Hébreux également, on trouve cette marque d'esclavage. Je n'ai rien trouvé de plus précis au sujet des esclaves noirs, mais je suppose qu'il en va de même.

L'évolution de la pensée européenne face à l'esclavage est visible dans une autre salle, qui présente un certain nombre d'objets montrant que certains intellectuels prenaient la défense des esclaves (même si, il faut bien l'avouer, cette "défense" pouvait parfois être fort maladroite et condescendante...).

Une gravure satirique de Toussaint Louverture, "Le Spartacus Noir", né esclave et devenu Gouverneur de Saint-Domingue près de vingt ans après avoir été affranchi, atteste également de cette période floue et pas toujours très glorieuse.

C'est là que j'ai un hoquet en regardant l'heure : il faut déjà songer au retour, et il y a encore tout un tas de salles que nous n'aurons pas le temps de visiter cette fois... Il faudra revenir !
Comme promis, en repartant je demande à l'accueil par où passer pour rejoindre les douves. Nous y parvenons en descendant un escalier, mais nous sommes quasiment à l'exact opposé de l'endroit où Léon a laissé tomber son pin's. Nous n'avons plus trop le temps de nous promener, aussi j'envoie Léon le chercher tout seul, pendant que je l'attends avec Hubert, Firmin, Gabrielle et Augustin. Le temps passe et nous ne le voyons pas revenir, je commence à stresser un peu (il y a aussi peu de trains dans le sens du retour qu'à l'aller...), j'envoie Augustin à sa rencontre pendant que j'occupe les trois petits avec une séance photo...


Ils finiront par revenir, mais sans le pin's... décidément, entre la perte du Leatherman à la Tour Eiffel et son pin's, Léon n'a pas de chance ! Ceci dit, ça lui apprendra peut-être à arrêter trimballer un milliard de choses quand nous partons en sortie...
Nous retournons à la gare, où je leur achète un petit goûter pour se remettre de ces émotions : nous aurons même quelques minutes pour le manger sur le quai avant l'arrivée du train.


Et voici enfin le week-end ! Bruno va enfin avoir l'impression d'être avec moi : je dois bien avouer que je n'ai pas trop réussi à libérer du temps pour lui depuis qu'il est arrivé. Il a d'ailleurs été mis dans le bain dès le départ : il est arrivé mercredi vers 16h, j'ai à peine arrêté de travailler pour lui dire bonjour et ensuite je n'ai sorti la tête des cahiers qu'à plus de 21h... Oui, j'ai honte !
Nous passons donc un début de week-end très calme, et je le lui ai promis : samedi, je ne touche pas au boulot ! Petite photo du samedi matin, à travers le rebord de la mezzanine :

Dimanche matin j'ai bien du mal à sortir de la couette. Je me dis que c'est peut-être parce que j'ai mis mon réveil un peu tôt (je voulais me lever pour travailler), je m'autorise donc une petite heure supplémentaire. Mais à neuf heures et quart, rien à faire : je n'ai pas envie de me lever ! En plus il fait froid, j'ai le bout du nez gelé et je sens même mon front tout froid, ce qui ne m'est pas arrivé depuis longtemps... depuis le vieux camion, en fait ! J'arrive à me mettre un coup de pied aux fesses pour sortir du lit, et là... je me dis qu'il fait quand même vachement froid ! Et en effet, en regardant le thermomètre :

Je trouve ça quand même étonnant, ce camion est mieux isolé que l'autre, et même si nous savons que nous entrons dans une période plus froide, je doute qu'il fasse -15°C dehors ! Le radiateur est éteint, je tourne le bouton mais rien ne se passe : c'est là que je réalise qu'en fait... il n'y a plus d'électricité ! Je suis un peu étonnée car habituellement, dès que l'électricité saute, tout le monde est sur le pont ! Je m'habille, sors du camion : personne. Il n'est pas très tôt mais pas très tard non plus, je me demande qui aller voir... Mamie ! Elle, elle sera debout depuis longtemps. Mais surprise en arrivant chez elle : elle a de l'électricité ! En fait, après vérification, je comprends qu'il n'y a que mon camion et la caravane d'Hélène et Didier qui ont ce problème. Didier est parti pour le week-end à Paris et Hélène semble ne pas être levée. Je suis le câble électrique et arrive au tableau, mais là je ne suis pas trop capable d'en faire plus. Il y a une rangée de boutons tous en haut, et à gauche un autre bouton noir qui est vers le bas, mais je ne sais pas si ça veut dire que ça a a disjoncté, ou si ce bouton-là est toujours vers le bas.

Définitivement, je crois qu'il va falloir que je cherche de l'aide car je suis un peu démunie et j'ai peur de faire une bêtise en y touchant. J'envoie un texto à Carole en espérant qu'elle soit réveillée, elle arrive cinq minutes plus tard. Après diverses manipulations (débrancher le camion et la caravane, en rebrancher un seul, essayer avec l'autre, intervertir les prises, changer de rallonge...), nous en concluons que c'est la caravane d'Hélène et Didier qui fait tout sauter. Entre deux, Hélène, Bruno et Augustin sont arrivés en renfort et nous multiplions les essais pour comprendre d'où ça vient exactement.



C'est finalement Bruno qui trouve la solution (temporaire), avec une multiprises qui sépare leur caravane en trois : c'est le secteur "cuisine" qui fait tout sauter, nous le débranchons donc.

Ainsi nous avons de l'électricité dans le camion, et Hélène a au moins du chauffage dans sa caravane : nous allons pouvoir rentrer nous mettre au chaud et prendre un petit-déjeuner, suite au prochain épisode !
Un peu plus tard, Hélène m'expliquera qu'elle pense savoir d'où ça vient : le frigo étant la seule chose susceptible de s'être allumée pendant la nuit (lors de la panne, donc), elle a cherché de ce côté-là. Le mur dans lequel se situe la prise du frigo a bien pris l'humidité pendant l'hiver, elle pense donc que c'est cette prise qui pose problème et effectivement, en le branchant ailleurs ça ne sautera plus ! Elle a quand même hâte que Didier revienne pour y jeter un oeil, et m'explique que bizarrement, c'est toujours quand il s'en va deux jours qu'il se passe ce genre de choses ! Un seul être vous manque...
Je passe une bonne partie de la journée à bosser mais la pause du samedi m'a fait beaucoup de bien et cette fois c'est dans la joie que je travaille ! Petite anecdote du dimanche après-midi qui nous fera bien rire, avec Bruno : nous entendons une famille qui passe à côté du campement. Un enfant déchiffre : "La fa-mille... mo-rale... morale ? C'est un drôle de nom, pour un cirque !" XD