Je suis encore dans mon lit lorsque j'entends le cliquetis du clavier à l'étage du bas. Dans la chambre, la lumière se répand à travers une fenêtre de toit. Il fait jour. Il fait beau. Je me lève sans bruit pour ne pas déranger ma compagne. Par la fenêtre, deux mésanges se poursuivent à travers les branches du pommier. L'escalier glisse un peu mais ne grince pas.

Le bureau du rez-de-chaussée est éclairé par l'écran de l'ordinateur. Françoise consulte alternativement les photos de la veille et "le Peterson", un guide des oiseaux. Elle s'aperçoit de ma présence et, après un "bonjour" rapide me demande :

- "Tu l'as pris en photo le faucon, hier, sur le chemin du retour ?"  

- "Bien sur que je l'ai pris. Il était vraiment beau."

-"Et bien je crois que c'est un faucon pèlerin. Ils n'en ont pas encore signalé sur le Der. Il faut que je m'assure que je ne me trompe pas. Tu peux me montrer tes photos ?"

L'appareil est encore dans mon sac à dos. Le téléobjectif y est accroché et j'ai un peu de mal à le sortir. La poignée se prend dans la fermeture éclair. Quelques secondes après, le boitier est sur "ON" et l'écran s'allume. La navigation est facile sur l'Alpha700, un petit joystick permet de faire défiler rapidement les photos. Je ne retrouve pas l'oiseau attendu. Je m'inquiète car hier j'ai du supprimer quelques photos pour libérer ma carte mémoire, pleine au moment ou les chevreuils étaient encore tout proches.

Je ne retrouve vraiment pas les photos du faucon. Françoise me montre son écran :

-"Tu vois là, les moustaches, près de l'oeil, ne sont pas bien visibles mais je pense vraiment que c'est un pèlerin."

Je l'écoute sans quitter le moniteur de mon appareil. Au milieu des photos prises la veille, je retrouve enfin la photo demandée. Je la montre à ma soeur. La confirmation tombe. Le faucon n'est pas un pèlerin. Il s'agit d'un beau faucon crécerelle. Petite déception.

Le reste de la famille nous rejoint pour le petit déjeuner. Nous parlons de la météo d'hier, venteuse, et du temps de la journée prévu avec autant de soleil mais sans le vent. Nous retournerons au Der cet après-midi. Maman et Aline nous accompagnerons.

Le Der est une petite mer intérieure, dans un coin de Champagne, posée dans un écrin de verdure. Ici tout est grand : 4800 hectares et 77 km de rivages. Tout est beau.

Maman regarde le lac et nous dit :

- "Si c'est pour voir des canards, il y en a au grand jard à Châlons. J'y vais souvent pour leur donner du pain."

- "Mais maman, ici, il y en a tout le long du rivage." lui répond Françoise en lui tendant la longue vue :

- "Regarde,il n'y a pas que des canards, il y a des oies, des foulques, des chevaliers combattants, et des arlequins, des bergeronnettes et ... des grues. Enfin ... les grues ... on les verra tout à l'heure."

Tout le monde est équipé. Une paire de jumelle pour l'un, un boitier numérique pour l'autre. Une longue vue est posée sur un trépied et passe d'oeil en oeil. Un petit garçon qui passe avec son père pourra, lui aussi, profiter du spectacle. Françoise, Bernadette et moi sommes pourvus de nos appareils. Aline a en main le bridge de Françoise.

La lumière est belle et les oies nous offrent le spectacle de leurs toilettes. Elles éclaboussent, se poursuivent et plongent dans l'eau sous l'oeil indifférent des canards.

La journée se passe sur le bord de l'eau. Nous nous rapprochons des grues. Nous les connaissons bien maintenant et disposons déjà d'un grand nombre de photos. Tans pis, nous en prenons encore quelques-unes. Ces oiseaux sont tellement majestueux et beaux.

Le soir tombe. Le coucher de soleil aura lieu dans un peu plus d'une heure. Nous nous apprêtons à partir mais Françoise souhaites connaitre l'endroit ou j'ai pris le pic épeiche de la veille. Direction "La presqu'ile de Larzicourt". La forêt est trop sombre et les enfants jouent encore bruyamment tout près de là. Nous n'apercevrons pas de pic.

Sur le bord du rivage l'eau commence à rosir. Les arbres sont couverts d'algues sèches. La hauteur de l'eau peut recouvrir les racines et monter plus haut. Les racines aériennes montrent où l'eau s'arrête.

Au loin, les grues trompettent. C'est le retour du gagnage. Le spectacle est magnifique. Une première troupe se pose bruyamment, elle est suivie par un vol d'oies cendrées. Des canards volent au ras de l'eau. Deux autres photographes se rapprochent du rivage. Ils sont bien équipés et installent leur trépied, un petit siège de toile et s'installent tels des pêcheurs, au bord de l'eau.

Le soleil se couche peu à peu. Cette lumière nous donne des visages magnifiques. Les paysages ne sont pas en reste. C'est vraiment trop beau. La température rafraichi, le soleil n'exerce plus son pouvoir. Encore quelques photos et il sera temps de rentrer. Un coup d'oeil à la lune et nous reprenons la voiture. Merci Françoise de cette belle invitation. Le week-end a été merveilleux.