Il est agréable pour Espéranto-Vendée d'être associée avec Grains de mémoire et à la Ville des Sables d'Olonne dans l'organisation de cette rencontre précisément en mémoire d'Alfred Roux.

Notre souhait était de retrouver en quelque sorte la compagnie d'Alfred, comme s'il était maintenant parmi nous, et de permettre une réflexion sur ce qu'est la résistance au sens large et actuel du mot. Dans son sens politique, ce mot est défini dans l'encyclopédie en ligne “Wikipédia" comme "le combat contre un envahisseur, un occupant ou un régime indésirable".

La rébellion de Spartacus, dans les années 73 à 71 avant notre ère, fut une forme de résistance contre l'esclavagisme. Aujourd'hui, des mouvements de résistance apparaissent dans de nombreux pays où la démocratie est confisquée par des puissances d'argent, des oligarchies, des religieux. La science comme la religion sont détournées de leur véritable mission.

Il est utile de rappeler cette citation de Marx selon lequel "Celui qui ne connaît pas l'histoire est condamné à la revivre." Pour parvenir à leurs fins, les pouvoirs tyranniques misent sur l'ignorance et détournent l'attention des véritables causes de nos problèmes et de nos malheurs. Ils font appel aux instincts et aux réflexes les plus vils; ils exploitant la carte des haines, des antagonismes, de la peur selon le principe "Diviser pour régner".

C'est précisément sur le mensonge, l'entretien et l'exploitation de l'ignorance qu'Hitler avait misé pour abêtir les masses à l'extrême. Il avait écrit dans “Mein Kampf“ : Toute propagande doit être populaire et régler son niveau intellectuel sur la réceptivité du plus borné parmi ceux à qui elle pense s'adresser (...) La réceptivité de la grande masse n'est que très réduite, la compréhension petite, en revanche, la faculté d'oubli y est grande".

L'écrivain Henri Barbusse, qui avait lui aussi participé de 1914 à 1916 à la Première Guerre mondiale, avait eu une réflexion tout à fait opposée à celle des tyrans : “Le dialogue sincère de deux hommes sincères officiellement ennemis parce qu'appartenant à deux pays différents fait ressortir fatalement tout le mensonge social. Si modeste qu'il paraisse, au milieu de tout l'épanouissement des grandes idées de fraternité et de raison, l'apport de la langue internationale est d'un ordre immédiat et pratique incomparable.

(...) “Certes, il n’est pas nécessaire pour compatir à la souffrance d’autrui, pour être révolté par l’injustice, de parler la même langue que les victimes. Il n’en est pas moins vrai que les bonnes volontés qui nous portent les uns vers les autres, que les axiomes de bon sens qui font que nous entrevoyons des ressemblances et des solidarités profondes, sont presque toujours enrayées dans la pratique par la confusion des langues.

A propos de mensonge, il peut-être utile de rappeler un concept introduit en 1947 dans la diplomatie des États-Unis par George Kennan, l'architecte du plan Marshall. Il s'agit
du concept du "mensonge nécessaire" et il est toujours d'actualité : “... on défendrait la vérité en recourant au mensonge, la liberté en recourant à la manipulation, la démocratie par le biais d’une oppression impitoyable, l’ouverture du régime par des opérations secrètes et sournoises“.

Dès 1935, Smedley Butler, l'un des généraux les plus décorés des États-Unis, eut le courage de dénoncer la politique de son pays par un acte de résistance particulièrement courageux en publiant son livre "La guerre est un racket". Aujourd'hui, il faudrait au moins un Smedley Butler dans tous les pays du monde.

L'espéranto fut entravé et persécuté par les pires régimes totalitaires du XXe siècle, en particulier ceux d'Hitler et de Staline qui craignaient l'échange d'idées et d'informations, la libre communication entre les peuples. Il est entravé encore de nos jours au profit de la langue d'un ordre économique au sujet de laquelle Margaret Thatcher avait proclamé, le 19 juillet 2000 : “Au XXIème siècle, le pouvoir dominant est l’Amérique; le langage dominant est l’anglais; le modèle économique dominant est le capitalisme anglo-saxon.

Ce n'est là qu'un petit aperçu des réflexions que devrait permettre ce rendez-vous autour d'Alfred Roux. On sait malheureusement trop peu sur sa relation avec l'espéranto qu'il enseigna au moins en 1936 aux Sables d'Olonne. L'espéranto est encore trop souvent considéré, par erreur, comme un passe-temps. Dans l'esprit du Dr Zamenhof, qui a fait don de cette langue à l'humanité en 1887, il s'agissait avant tout d'introduire un principe d'équité dans les relations internationales, dans les échanges entre les peuples. Zamenhof avait donc plus d'un siècle d'avance quant au principe d'équité et 61 ans d'avance sur la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948.

Les circonstances de la vie ne permirent pas à Alfred Roux de développer des recherches et de mener des actions autres que l'enseignement de l'espéranto, mais avec les leçons données par l'histoire, Espéranto-Vendée redonne vie à ses aspirations de justice sociale et de paix.

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Photos :

(FR/ EO) — Hommage à Alfred Roux, 29 juin 2013 / Omaĝo al Alfred Roux, 29an de junio 2013

Exposition virtuelle :

Résistances d'aujourd'hui