Ayons une pensée compatissante pour les spectateurs qui avaient obtenu, hier soir, une invitation pour l’avant dernière montée des marches, s’étaient mis sur leur 31 et étaient partis le cœur en fête pour une belle soirée cannoise. Les malheureux ignoraient qu’ils allaient assister à la projection expiatoire de l’édition, celle par laquelle les festivaliers payent chaque année leurs excès de fêtes, de glamour et de paillettes.
Faute de Michael Haneke ou d’Ulrich Seidl, exécuteurs habituels des basses œuvres du Festival, les sélectionneurs ont porté leur choix, cette année, sur le Mexicain Michel Franco, repéré en 2012 à Un Certain regard avec Despues de Lucia ( l’histoire d’une collégienne martyrisée par ses camarades de classe). Excellente recrue !
Prix du film cruel
Dans une mise en scène glaçante, digne d’un Haneke Mexicain, Chronic s’attache aux pas de David (Tim Roth, imperturbable), un infirmier spécialisé dans les soins aux patients en fin de vie. Sa première malade a déjà l’aspect d’un cadavre lorsqu’on assiste à sa toilette. La scène dure le temps qu’il faut pour bien regretter d’être venu.
Cette patiente passée de vie à trépas (re-scène de toilette, mortuaire cette fois), David est appelé au chevet d’un architecte victime d’un AVC, auquel il reste juste assez de force pour insulter sa femme et regarder en boucle des films pornos. On s’intéressera ensuite aux effets de la chimiothérapie sur une malade atteinte d’un cancer de l’intestin...
Comme si ce n’était pas suffisant, David cache sous ses airs d’infirmier modèle un douloureux secret qui a détruit sa famille et continue de le miner. On s’attend donc à ce que la situation empire.Pas de surprise, c’est le cas.
Il faudra peut-être songer, un jour, à ajouter au palmarès un «Prix du film cruel». Bien qu’un peu court (1h33 seulement), celui-là le mériterait amplement: une vraie punition !
Même Tim Roth, visage fermé, marmoréen, a l’air de regretter amèrement le bon temps de Grace de Monaco...