Ignorance générale

En plus d'autres expériences, dans des circonstances et des milieux très divers, les deux initiatives estivales de l'association Espéranto-Vendée, en 2009, sur des plages vendéennes, d'abord aux Sables d'Olonne (1) à l'occasion du centième anniversaire de l'espéranto dans cette ville, ensuite à La Faute-sur-Mer (2) à l'occasion d'une étape de Marc Pleysier en Vendée lors de son tour de France (carte) sur vélo couché “ALIAciklo“, ont permis d'observer, dans un cadre inhabituel, l'attitude de gens qui découvrent ou redécouvrent l'existence d'une alternative au système de communication internationale inéquitable basé sur l'anglais. En fait, ce qui peut être observé ailleurs et qui est décrit ci-après, a été confirmé dans un cadre détendu, sur la côte vendéenne, où le public est vraiment international durant la période de l'été.

La plupart des gens, même des intellectuels, ne savent rien ou presque rien sur la Langue Internationale Esperanto. Naturellement, pour eux, parler d'application professionnelle de l'espéranto a quelque chose de surréaliste. Pour ceux qui en savent quelque chose, il s'agit le plus souvent d'une connaissance superficielle. Ne peut être considérée comme connaissant l'espéranto une personne capable de dire sans erreur le nom de son initiateur, ses date et lieu de naissance, d'indiquer le titre du premier manuel, l'année et la ville de sa publication, l'année et la ville du premier congrès universel d'espéranto, ou des généralités sur ses aspects linguistiques. Parmi ceux qui savent cela, la plupart ne savent rien sur l'application et l'état actuels de la langue dans le monde. Des plus anciens s'étonnent que « ça » existe encore.

Mythes et préjugés


Des mythes et des préjugés existent et sur l'espéranto, et sur l'anglais, et sur le multilinguisme. Plus précisément des mythes et des préjugés:

  1. défavorables à l'espéranto,
  2. excessivement favorables à l'anglais,
  3. moyennement favorables au multilinguisme.


Le principal problème de l'espéranto est en ce que, du côté de personnes au courant de son existence, souvent une minorité, en fonction du milieu (les intellectuels ne sont pas forcément cultivés sur le sujet), il n'est trop souvent considéré que comme un passe-temps ne rapportant pas d'argent, sans utilité pratique et professionnelle, ou comme une utopie (3).

Des gens qui reçoivent une information de façon plus ou moins hasardeuse sur l'existence d'une telle langue au sujet de laquelle ils n'ont jamais entendu ou lu quoi que ce soit ne peuvent absolument pas imaginer qu'une langue autre que l'anglais, beaucoup plus simple, pouvant être apprise en un temps record par n'importe quel peuple, très expressive, et surtout plus équitable, puisse fonctionner dans ce rôle de façon satisfaisante. Il est pour eux à peine croyable qu'une telle langue soit utilisée depuis longtemps et qu'elle n'ait jamais cessé de fonctionner, de façon plus ou moins vigoureuse suivant les périodes. Par conséquent, ils s'étonnent qu'une telle langue, dont ils découvrent (ou redécouvrent) et reconnaissent éventuellement l'aspect génial, ne soit pas encore devenue, après plus de 120 ans d'existence, la langue conventionnelle pour les échanges et les relations entre les peuples. Leur scepticisme est compréhensible : ils ne savent rien de son histoire, des obstacles qu'il a dû vaincre et doit continuer de vaincre.

Sur France Culture, le 4 novembre 1992, le professeur Umberto Eco, qui l'a étudié scientifiquement pour préparer un cours au Collège de France, a reconnu que les motifs qui ont entravé sa propagation rapide dans le monde ne sont pas linguistiques mais politiques. Il existe aussi des motifs psychologiques qui ont été étudiés, analysés et décrits par Claude Piron, un ancien traducteur francophone de l'Onu et de l'OMS pour l'anglais, l'espagnol, le russe et le chinois, qui a ensuite enseigné la psychologie à l'Université de Genève.

Des idées géniales ont eu parfois besoin de décennies, et même de siècles pour mûrir, pour devenir des choses ordinaires et normales de la vie de tous les jours : les chiffres indo-arabes, le système métrique, le droit de vote des femmes, l'intégration sociale des handicapés (aveugles, sourds, muets, mutilés et autres), etc.. Le public n'a pas conscience du côté politique de l'affaire : les États sont plus soucieux de l'intérêt d'une minorité privilégiée influente que de l'intérêt général (4).

Il existe aussi le fait que, dans les médias, il n'est pas rare de pouvoir lire ou entendre des allusions, des expressions ou des épithètes trompeurs, induisant en erreur et qui, par répétition, restent gravées dans le subconscient des citoyens, des lecteurs et des auditeurs, par exemple : “échec“, “langue inventée de toutes pièces“, “adeptes“ et beaucoup d'autres expressions dévalorisantes ou ressources linguistiques (utilisation du passé pour laisser entendre qu'il s'agit d'une chose révolue), même si le reste de l'information est irréprochable. Par exemple, durant la période entre les deux rencontres sur la côte vendéenne mentionnées ci-dessus, la phrase suivante a été insérée dans un article par ailleurs honnête : “Un échec pour cette langue qui se voulait universelle au début du siècle dernier“. En fait, il est apparu par la suite que le coupable de cela n'était pas le journaliste venu sur place pour son reportage, mais un collègue qui avait modifié le contenu avant la mise en page définitive et l'impression. En fait, l'échec n'est pas pour l'espéranto, mais pour le journalisme dans l'application de la Charte du journaliste adoptée en France en 1918 et révisée en 1938.

Le record de désinformation et de propagation de préjugés peut être attribué, jusqu'à maintenant, dans la présente année 2009, à Radio France Internationale, qui est la voix de la France pour l'étranger : “Si l’esperanto vit toujours, son utilisation n’a cependant jamais dépassé les cercles de linguistes et d’intellectuels“ (5). Ceci dans le dernier paragraphe de conclusion d'un article publié précisément le 26 juillet 2009, date anniversaire de la parution du premier manuel d'espéranto en 1887, et alors que s'ouvrait ce même jour, à Białystok (Pologne), ville natale du Dr Zamenhof, le 94ème Congrès Universel d'Espéranto avec environ 2000 participants de 63 pays, et dans l'année du 150ème anniversaire de la naissance du Dr Zamenhof (1859) !

Et ceci alors que, voici bientôt cent ans, en 1910, Ernest Archdeacon, pionnier et mécène de l'aviation et de l'automobile, avait écrit, après avoir participé au Congrès Universel d'Espéranto de Barcelone (1909) : “Les Catalans m’ont complètement stupéfié par la pureté et la facilité avec laquelle ils parlaient l’espéranto. Je l’ai constaté auprès de simples ouvriers de Barcelone, espérantistes de fait, qui n’avaient ni le temps de participer au congrès, ni les moyens de verser une cotisation de dix francs pour y assister. Les espérantistes sont extrêmement nombreux dans le monde ouvrier ”. (6)

Dans la même année 1910, le Dr Zamenhof avait écrit au journal allemand “Der Arbeiter Esperantist“ (Le Travailleur espérantiste) : “Il se peut que notre langue démocratique n'ait pour nul au monde autant d'importance que pour les travailleurs, et j'espère que le monde ouvrier sera plus ou moins tôt le plus fort soutien de notre cause. Les travailleurs feront non seulement l'expérience de l'utilité de l'espéranto, mais ils en ressentiront plus que d'autres l'essence et l'idée de l'espérantisme“.

Dans “L’Homme et la Terre“, dont le premier cahier, rédigé en 1904, parut en 1905, le grand géographe Élisée Reclus avait déjà pu constater et noter : “Les progrès de l’espéranto sont rapides, et l’idiome pénètre peut-être plus dans les masses populaires que parmi les classes supérieures, dites intelligentes. C’est, d’un côté, que le sentiment de fraternité internationale a sa part dans le désir d’employer une langue commune, sentiment qui se rencontre surtout chez les travailleurs socialistes, hostiles à toute idée de guerre, et, de l’autre, que l’espéranto, plus facile à apprendre que n’importe quelle autre langue, s’offre de prime abord aux travailleurs ayant peu de loisirs pour leurs études.“ Des organisations espérantistes ouvrières ont commencé à exister voici plus d'un siècle, autour de l'année 1905. En 1906, à l'occasion du congrès d'Amiens, le syndicat français CGT (Confédération Générale du Travail) vota une résolution en faveur de l'apprentissage et de l'utilisation de l'espéranto dans les relations internationales.

Plus tard, au début des années 1920, à la Société des Nations, alors que le gouvernement français s'opposait avec mépris à toute discussion sur une proposition d'enseigner l'espéranto dans toutes les écoles du monde, celui-ci trouva un défenseur en la personne d'Inazô Nitobe, le secrétaire général adjoint de la Société des Nations, figure de très grande renommée, même hors du Japon, où un billet de 5000 yens émis le 1er novembre 1984 lui a été consacré. Usager talentueux de l'anglais, Inazô Nitobe avait pu observer le fonctionnement de l'espéranto dans le rôle de langue internationale lors du Congrès Universel d'Espéranto qui s'était tenu à Prague en 1921 : “Pendant que les riches et les gens cultivés jouissent des belles lettres et des traités scientifiques en langue originale, les pauvres et les humbles utilisent l'espéranto comme « lingua franca » pour leurs échanges d'idées. L'espéranto devient pour cette raison un moteur de la démocratie internationale et d'une relation solide. Il est nécessaire de prendre en considération cet intérêt des masses dans un esprit rationnel et favorable lorsque l'on étudie cette question de langue commune“. (7)

Le public est si ignorant du sujet qu'il est possible, à des professionnels de l'information, de l'animation radiophonique et télévisuelle, de masquer leur propre ignorance et de dire ou d'écrire n'importe quoi avec aplomb ! Malheureusement, ce sont trop souvent des gens qui font semblant de connaître et dont les connaissances sur le sujet traité n'ont d'autre source et référence que le ouï-dire perpétuellement répété et jamais vérifié. Un proverbe de l'espéranto dit : "Inter blinduloj reĝas strabuloj“ — Parmi les aveugles règnent ceux qui louchent — ou : Parmi les aveugles, ceux qui louchent sont rois...

Il ne se trouve pas toujours un homme aussi brillant qu'Umberto Eco pour défendre l'espéranto contre de telles présentation inexactes, parfois malveillantes, parfois stupides, parfois sans réflexion, comme il l'a fait en août 1993, lorsque, pour le quotidien “Le Figaro“, (8), le journaliste Franz-Olivier Giesbert a dit : “C'est l'utopie de l'espéranto...“. Réponse : “Utopie jusqu'à hier, sans doute. Mais une utopie de ce genre a peut-être plus de chance de se réaliser aujourd'hui. Grâce à la télévision. Avec elle, on peut tout faire. En une seule génération, après des siècles d'incompréhension, elle a permis d'apprendre l'italien aux Albanais.“ Le 27 février 1996, dans une émission télévisée de Paris Première, lorsque le journaliste Paul Amar avait fait allusion à “l'échec de l'espéranto“, il avait corrigé en disant qu'il n'était pas possible de parler d'échec et précisé : “Du point de vue linguistique cette langue suit vraiment des critères d’économie et d’efficacité qui sont admirables.“ Il est très rare de pouvoir entendre un plaidoyer éloquent pour l'espéranto comparable à l'intervention du fameux généticien et écrivain Albert Jacquard dans cinq émissions successives de France-Culture (9).

De l'autre côté, il existe une immense pression, un bourrage de crâne, un conditionnement intense, une véritable "décervelage à l'américaine“ pour pousser à une croyance aveugle, comme religieuse, qu'il n'est point de salut en dehors de l'anglais : Echec du globish : Doit-on continuer encore longtemps sur cette voie ? (10). Le procédé est clair : donner au public l'idée de réussite et de nécessité absolue pour l'anglais, et l'idée d'échec et d'inutilité pour l'espéranto.

Courage intellectuel et moral

Dans une telle situation, un grand courage intellectuel et moral est nécessaire pour contester l'anglais dans le rôle de langue internationale alors qu'il est en d'abord une langue NATIONALE et sert en premier lieu les intérêts de nations pour lesquelles il est la langue native : elles deviennent insidieusement des centres de décision et d'influence disproportionnée pour tout dans le monde, elles constituent les principaux les points de départ et d'arrivée des flux d'échanges. Une vidéo sur le trafic aérien mondial peut aider à comprendre ce fait. Lorsque l'on voit par quels procédés le premier ministre britannique Tony Blair a fait élire la ville de Londres pour les Jeux Olympiques de 2012 et par quels mensonges il a allié la Grande-Bretagne aux États-Unis pour faire la guerre en Irak, on devrait moins se fier au discours que fit son successeur Gordon Brown, le 17 janvier 2008, sous le titre "L'anglais — la langue du monde“ (11), dans lequel il a prétendu que la Grande-Bretagne faisait “un cadeau“ au monde... (12).

L'approbation de l'espéranto dans ce rôle, et surtout un soutien public à son égard, exigent un courage aussi grand, de l'audace, de l'esprit d'innovation. Le soutien à l'anglais n'exige pas autant de courage et d'audace : il suffit de suivre le troupeau et de s'enfoncer dans l'ornière de la routine. C'est pour cela que se taisent une grande majorité des citoyens, leurs représentants, les dirigeants qui vivent dans l'illusion que l'anglais a résolu le problème. Ils ont sacrifié et continuent de sacrifier une somme considérable de temps et d'argent à l'anglais, pour eux-mêmes ou leurs enfants, alors que les natifs anglophones n'ont pas ce souci et alors que leurs pays tirent un profit et un avantage énormes de cette situation. Ils n'ont pas conscience que, même avec une bonne connaissance de l'anglais, ils leur restent cependant très inférieurs en situations de tractation et de négociation. Il ne s'agit pas ici du “Bad English“ ou du “Broken English“ triomphants, de bavardage ordinaire et banal, de la simple possibilité de se débrouiller. Dans les conférences où l'anglais est la seule langue de travail, ce sont des natifs anglophones qui interviennent le plus fréquemment, le plus longuement et le plus adroitement pour imposer leur point de vue. Le pourcentage de personnes connaissant vraiment l'anglais, capables de traiter à niveau égal avec des natifs anglophones, est très bas, inférieur à 10%, même à 5% selon les pays. Une entreprise que la mauvaise qualité des productions et services contraindrait à en vendre de 90 à 95% à perte ferait rapidement faillite. Il n'y a que les États non-anglophones pour agir ainsi, grâce à l'obéissance silencieuse des contribuables, alors que les moyens humains et financiers manquent pour améliorer le niveau d'enseignement, réduire le stress des élèves et des enseignants, assurer la sécurité dans les établissements d'enseignement, résoudre le problème des classes surchargées et une multitude d'autres problèmes sociaux.

Que l'on comprenne clairement qu'il ne s'agit pas de mépris à l'égard des peuples natifs anglophones et de leur langue. Shakespeare ne serait certainement pas fier de l'usage actuel d'une langue qu'il a utilisée avec tant de talent. Il y a des gens estimables et méprisables chez tous les peuples. Tous les peuples peuvent apprendre de la part des autres quelque chose d'utile pour le bien commun.

Heureusement, bien que tardivement, peut-être pas trop, une prise de conscience apparaît sur ce problème. Des gens ont l'audace de montrer enfin que la voie par le seul anglais est erronée et illusoire, que c'est une pseudo-solution au problème de communication internationale du fait qu'il engendre d'autres problèmes et que le rapport qualité-coût, déjà excessif en temps normal, est scandaleux en temps de crise. Un enfant d'intelligence moyenne peut sortir de l'école élémentaire avec une bonne connaissance de l'espéranto sans horaires et efforts excessifs. Pour atteindre le même résultat en anglais, il faut une "surdose"d'enseignement considérable, et ceci au détriment d'autres matières, entre autres la langue maternelle ou nationale. La formation d'enseignants est dix fois plus longue et plus coûteuse pour l'anglais que pour l'espéranto. L'économie réalisable doit être consacrée au développement d'applications pratiques et professionnelles.

La Commission européenne bafoue la devise de l'UE — “Unité dans la diversité“ — par le seul usage de la langue de deux des 27 États-membres — La Grande-Bretagne et l'Irlande —, c'-à-d. 13% en tout de la population de l'UE. De plus, elle a exigé des pays de l'Est candidats à l'adhésion à soumettre leur dossier de candidature en anglais uniquement. Est-ce ainsi que se prépare cette Europe de la “diversité“, lorsque le mauvais exemple vient d'en-haut ?

Dans l'Union européenne, la connaissance de l'anglais comme langue maternelle est de plus en plus fréquemment exigée dans des annonces de recrutement (“English mother tongue" et "English native speaker“) pour des fonctions de hautes responsabilités, donc de décision et d'influence, ce qui démontre bien que l'anglais prétendument international ne fait pas l'affaire et que par lui, des gens sans scrupules s'emparent insidieusement des leviers politiques et économiques de l'Union. Voila la démonstration que l'anglais est un échec dans le rôle de langue internationale et un succès comme langue de domination et de langue impérialiste.

Le plus affligeant, c'est l'incroyable niaiserie affichée dans le JT de 13h du 5 août 2009 par France 2 où l'enseignement de l'anglais prodigué en France par des natifs anglais était présenté comme une initiative exemplaire ! Est-ce ainsi que l'on prépare l'“unité dans la diversité“ ?

Une véritable langue internationale est une langue pouvant être enseignée n'importe où par des gens de n'importe quelle nationalité. Le bon équilibre de l'UE requiert justement une telle langue.

L'UE a le service linguistique le plus imposant et le plus dispendieux du monde, mais ce service est si lourd et incommode, il occasionne tellement de retards dans la consultation et la prise de décision, que la plupart des décisionnaires et des fonctionnaires se tournent vers le seul anglais, ce qui démontre que le multilinguisme est illusoire (voir : “L'illusion du multilinguisme“).

Cette situation était prévisible et prévue : “L'élargissement de l'Union européenne à l'Europe centrale va poser de manière brutale le problème de la langue des Européens. Comment faire pour que cette tour de Babel, qui comporte aujourd'hui 11 langues officielles — 22 demain, sans compter les langues régionales —, puisse éviter une cacophonie paralysante ? Dans l'Union d'aujourd'hui, avec ses quinze pays, les coûts de traduction absorbent déjà des sommes énormes. Mais l'utilisation de toutes ces langues a bien d'autres inconvénients. Le président du Parlement européen, l'Espagnol Gil-Robles, reconnaissait récemment qu'elle rendait très difficiles de véritables débats publics, médiatisables, au sein de l'Assemblée européenne, qui souffre d'un déficit de reconnaissance dans l'opinion.“ (“Le Monde de l'Éducation“, février 1998).

Une étude détaillée des divers systèmes de communication linguistique internationale incluant l'anglais, le multilinguisme et l'espéranto est parue en 1994 dans un ouvrage de Claude Piron sous le titre "Le défi des langues“ (13). En 2003, du fait de l'indifférence et de la passivité des partis politiques face aux principes de démocratie et d'équité linguistiques, un mouvement politique vit le jour sous le nom d'Europe - Démocratie - Espéranto. Il a participé aux élections européennes de 2004 et 2009.

Le 1er juillet 2009, justement avant les rencontres sur la côte vendéenne, une suite et actualisation du livre "Linguistic Imperialism“ (14), du professeur Robert Phillipson, paru en 1992, a vu le jour sous un nouveau titre : “Linguistic Imperialism Continued“(15). Entre-temps, en 2003, un autre ouvrage de lui est paru sous le titre “English-only Europe? Challenging language policy“(16), et sa traduction en espéranto “Ĉu nurangla Eŭropo ?"(17) en 2004, puis “The Linguistic Imperialism of Neoliberal Empire“(18) en janvier 2008 .

Charles Xavier Durand, à qui 25 années de vie au Japon, aux États-Unis et au Canada permirent d'observer l'anglais dans le rôle de langue internationale et "Les absurdités des politiques linguistiques européennes", publia successivement, dans les années 2002-2003, "La mise en place des monopoles du savoir" (19) et "La nouvelle guerre contre l'intelligence" (20). En septembre 2005, un rapport commandé par la Haute Autorité de l'Évaluation de l'École à François Grin, professeur de l'Université de Genève, fut publié sous le titre “L'enseignement des langues étrangères comme politique publique“(21).

Les professeurs Phillipson et Grin n'affirment pas que l'espéranto est LA solution, mais qu'il doit être pris en considération sans préjugé parmi toutes les solutions possibles. Dans le chapitre 7 de son livre “La nouvelle Europe. Paris-Berlin-Moscou — Le continent européen face au choc des civilisations“ (22) publié en avril 2009, l'économiste Marc Rousset, ancien directeur général de grandes entreprises (Veolia, Carrefour, Aventis) préconise l'espéranto comme langue de l'Europe alors que, depuis plusieurs années, le président de la firme japonais Swany, Etsuo Miyoshi, publie des paidoyers pour l'espéranto sous forme de réclame dans des grands journaux de l'Union européenne qui, dans leur information, continuent de passer l'état actuel de la langue sous silence.

Alors que se perpétuent les mythes sur l'anglais et le conditionnement en sa faveur, il peut être utile de rappeler l'attitude sage du Lord britannique Robert Cecil (futur Prix Nobel de la Paix 1937) qui, en 1922, alors que le gouvernement français barrait la voie à l'espéranto à la SDN, avait exhorté la Commission Intellectuelle de Coopération à “se souvenir qu'une langue mondiale n'est pas nécessaire seulement pour les intellectuels, mais avant tout pour les peuples eux-mêmes.“ Informer les gens sur l'application pratique de l'espéranto dans la vie professionnelle exige en premier lieu des explications et de l'information sur l'existence de cette langue dont le nom d'origine est “Langue internationale“ (23), et dont l'initateur avait choisi le pseudonyme “Docteur Espéranto“ dans un pays alors sous occupation, disparu de la carte de l'Europe, où régnaient la censure, des conflits inter-ethniques, la violence, l'insécurité.

De tout cela, les gens qui venaient et repartaient de la plage de La Faute-sur-Mer ne savent pratiquement rien, n'en ont aucune conscience.

(à suivre : La voie de l'application professionnelle de l'espéranto)

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1. Dimanche 5 juillet 2009.
2. Lundi, 3 août 2009.
3. Les “utopies“. L’euro, une monnaie sortie de l’utopie .
4. “La recherche de la langue parfaite“, Paris : Seuil. 1994. p. 378 à propos de l'avis de l'encyclopédiste français d'Alembert : “Parmi toutes les objections, celle qu’avait déjà formulée Fontenelle, à laquelle fait écho le discours d’introduction de D’Alembert à l’Encyclopédie, sur l’égoïsme des gouvernements, qui ne se sont jamais distingués dans la détermination de ce qui était bon pour l’ensemble de la société humaine, est encore valable“.
5. Radio France Internationale (RFI) : Sub la titolo “Ouverture d'un congrès mondial d'espéranto“. “Si l’esperanto vit toujours, son utilisation n’a cependant jamais dépassé les cercles de linguistes et d’intellectuels.
6. “Pourquoi je suis devenu espérantiste“, avec préface de Henri Farman. Paris : Arthème Fayard. 1910. p. 150.
7. “La monda lingvo-problemo“, 2, 1970. p. 91-92 : “The common language question before internationale organizations“. Ivo Lapenna. Cité par Ulrich Lins dans “La danĝera lingvo“, p. 64.
8. “Le Figaro“, 19 août 1993, p. 11: “C'est l'utopie de l'espéranto ?“. Réponse : “Utopie jusqu'à hier, sans doute. Mais une utopie de ce genre a plus de chance de se réaliser aujourd'hui. Grâce à la télévision. Avec elle on peut tout faire. En une seule génération, après des siècles d'incompréhension, elle a permis d'apprendre l'italien aux Albanais.
9. Albert Jacquard à propos de l'espéranto, sur France Culture :
http://jerome.desquilbet.org/pages/254

10. Échec du Globish : Doit-on continuer encore sur cette voie ? Il s'agit d'extraits de journaux télévisés des principales chaînes françaises sur lesquelles on insistait lourdement pour pousser à l'apprentissage de l'anglais.
11. “English - The World’s language“ (L'anglais — la langue du monde) . 17 janvier 2008. Peut être vu et écouté sur Youtube : “PM announces new English language learning resources“. Versions de vidéos sous-titrées en espéranto, en français.
12. Voir “Le « cadeau » de Gordon Brown au monde“ (PDF).
13. "Le défi des langues“. Claude Piron. Paris : L'Harmattan. 1994. 336 p.. ISBN 2-7384-2432-5
14. “Linguistic Imperialism“. Robert Phillipson. Oxford : Oxford University Press. Majo 1992. 374 p. Table des matières (en anglais). Présentation (10 images).
15. “Linguistic Imperialism Continued“. Robert Phillipson. Londres : Routledge. 1er juillet 2009. 416 p.. ISBN: 978-0-415-87201-0
16. “English-only Europe? Challenging language policy“. Robert Phillipson. Londres : Routledge. 6 janvier 2003. 256 p. ISBN: 978-0-415-28807-1. Extraits en anglais.
17. “Ĉu nurangla Eŭropo ?“ . Robert Phillipson. Rotterdam : UEA. 2004.254 p.. ISBN 92 9017 084 0.
18.“The Linguistic Imperialism of Neoliberal Empire“. Robert Phillipson. Londres : Routledge, janvier 2008. 43 p..
19. “La mise en place des monopoles du savoir“. Charles Xavier Durand. Paris : L'Harmattan. 2002. Réédition en préparation.
20. “La nouvelle guerre contre l'intelligence“. Charles Xavier Durand. Paris : François Xavier de Guibert. 3 vol.. 2002-2003.
21. “L'enseignement des langues étrangères comme politique publique“. Septembre 2005. 131 p.
22. “La nouvelle Europe Paris-Berlin-Moscou - Le continent paneuropéen face au choc des civilisations“. Marc Rousset. Paris : Godefroy de Bouillon. 01.04.2009. 538 p.. Critique en français de EuropeMaxima. Entretiens avec Marc Rousset : Podcast de BFN-Radio , Radio Courtoisie sur Dailymotion (sur l'espéranto à partir de 7:00 jusqu'à 11:27), Vieille Europe (même chose : à partir de 28:40, sur l'espéranto à partir de 51:16).
23. Titre du premier manuel de la Langue Internationale en russe : Международный язык.