Mardi matin un magnifique lever de soleil me fait sortir du camion (je l'avoue, habituellement je ne mets pas le nez dehors avant la récré du matin !) :

C'est-y pas joli, ces deux caravanes en hiver ?...

J'en profite pour observer un peu ce qui se passe chez les Morallès au petit matin.
Nous avons tout d'abord Firmin le postier, qui ne renonce pas à sa tournée malgré la neige !

Léon et Augustin, quant à eux, continuent de travailler à leur igloo : eb effet, maintenant qu'il est terminé ils envisagent une extension !


La journée se passe tranquillement, il y a quelque chose de "relâché", on sent que le départ est proche. Pour moi ça ne change pas grand-chose au niveau du rythme, mais il est vrai que les autres n'ont plus le chapiteau : j'en vois un passer de temps en temps, errant comme une âme en peine. Finalement un charter pour Nantes s'organisera dans l'après-midi, et mon petit doigt me dit que la Fnac a eu de bonnes rentrées !
Je m'aperçois aujourd'hui que je tombe dans la déchéance la plus totale : pour dîner j'ai vraiment la flemme de ressortir dans le froid afin d'aller faire chauffer mon bol de purée de brocolis dans le camion de Carole. En effet je n'ai pas de micro-ondes dans le mien et sans eau pas envie de mettre ça dans une poêle et de devoir faire la vaisselle après. Du coup j'écoute ma paresse et mange mon bol de purée froide... Ah la la, il est temps que j'arrête, je ne sais pas comment je finirais, autrement ! XD
Nous avons décidé qu'il n'y aurait pas d'école mercredi matin : comme nous faisons la route l'après-midi (et que, vu la météo, nous n'avons aucune certitude quant à notre heure d'arrivée sur la prochaine place), j'en profiterai pour ranger le camion tranquillement et préparer la classe de jeudi. Ainsi, ce mardi soir c'est la fête : je m'accorde une petite soirée sans boulot ni blog, avec tout d'abord apéro-tarot chez Pierre-Yves, puis film chez Jean. Nous regardons "L'Apollonide", film de Bertrand Bonello qui nous fait partager le quotidien des filles d'une maison close de luxe à la charnière du 19ème et du 20ème siècle.

J'en avais plutôt entendu du mal, ce qui m'avait découragée d'aller le voir au cinéma, eh bien finalement je n'aurais pas dû écouter ces critiques car j'imagine que sur grand écran ça devait donner ! Ceci dit je ne me plains pas : Jean a un vidéoprojecteur et un système son qui permettent d'être immergés dans l'univers de l'histoire. Les costumes et les couleurs sont magnifiques, le son est délicieux (on entend le frou-frou des robes et le léger craquement des divans lorsqu'un personnage s'y assoit)... Les critiques négatives que j'avais entendues lui reprochaient son manque de véritable "histoire" et un rythme trop lent pour dire, au final, pas grand-chose. Pour ma part c'est justement cet aspect contemplatif que j'ai aimé, un long ruban de soie déroulé tout doucement, juste pour le plaisir de le faire glisser entre ses doigts. Je bloquerai sur une phrase que je trouve très belle : "Si nous ne brûlons pas, comment éclairer la nuit ?"... Elle me fait penser à cette phrase de Nietzsche : "Il faut avoir du chaos en soi pour enfanter une étoile qui danse", qui avait été un éblouissement pour moi il y a quelques années. Bon, Jean et Yann (qui s'est joint à nous à la fin du film) n'ont pas l'air très convaincus par la puissance poétique de ces phrases, je me sens un peu seule ! Allez, il y en a bien un dans les lecteurs du blog qui va être d'accord avec moi ! Non ?... Vraiment ?... Bon... XD
Revenons sur terre, alors, et en route pour la prochaine place !
Mercredi matin j'ai prévu à peu près un milliard de choses à faire et je commence à douter de parvenir à boucler mon programme. Au menu : vaisselle, rangement du camion, douche à la salle de spectacle car je ne sais pas quand je pourrai prendre la prochaine, préparation de l'école pour demain, vidage des toilettes et courses (je voudrais surtout acheter un pack d'eau car la météo ne prévoit pas de dégel avant le début de la semaine prochaine). Bon d'accord, dès le début j'aurais bien dû me douter que ça faisait beaucoup pour une seule matinée ! D'autant plus que Didier va avoir besoin de prendre le camion pour aller chercher de l'essence à côté... Je commence donc par le rangement du camion (qui me prend un certain temps : quand on reste deux semaines à un endroit, on a un peu tendance à s'étaler!). L'épisode "je vide les toilettes" sera un moment mémorable, qui me donnera envie de partir en courant en laissant tout en plan, mais je me donnerai du courage en me disant que je raconterai ça ici et que si si, un jour j'en rirai, moi aussi... Laissez-moi donc vous raconter le sketch du jour... C'est croquignolet...
Hier soir, Carole m'a demandé si j'avais remarqué qu'il y avait une grille juste devant mon camion, pour vider. Bien évidemment la réponse est non : depuis deux semaines je vais vider à l'autre bout du campement... Ce matin, je me dis donc "Aaaah, c'est chouette, je vais pouvoir aller à la grille dont m'a parlé Carole, c'est juste à côté!". Cela m'arrange bien, d'ailleurs, puisque je ne trouve aucune des deux charriottes (matin de grand départ : tout le monde a de la vaisselle à aller faire à la salle se spectacle à côté, des bouteilles d'eau à remplir, du verre à aller vider...). Je prends donc les toilettes à la main (ah, ça me rappelle des souvenirs de mes premières tournées!), et me rends à cette fameuse grille juste devant le camion. Je manque de me ramasser en glissant sur une plaque de glace mais réussis à retrouver l'équilibre in extremis : bon, on va y aller tranquille, alors ! Arrivée devant la grille j'essaie de la soulever, mais là : impossible. Elle est soudée au sol par le gel... J'hésite un moment à aller à l'autre grille mais c'est loin... Je me dis donc "Oh et puis zut, pour une fois je ne vais pas enlever la grille, tant pis, on n'en mourra pas". Sauf que... c'est une petite grille... et qui dit petite grille dit grille étroite... et qui dit grille étroite dit... euh... bon, je ne vous fais pas un dessin. C'est trop étroit pour que tout soit évacué, quoi. J'arrête vite le massacre en m'apercevant du problème, et là : comment faire ?... XD Je ne vais quand même pas repartir en laissant ça comme ça. Il est où le bouton "retour arrière" ?... Bien évidemment, comme tout le monde est sur le départ il y a du passage et je suis à peu près certaine que quelqu'un va venir dans le coin dans les trois minutes. Que faire, que faire ?... Trouve une solution, viiiite ! Allez, haut les coeurs, "Tu as tes gants", me dis-je, "on les lavera bien après, c'est promis". Je parviens donc à arranger mon problème... pour me retrouver avec un autre souci... Sans eau, comment nettoyer les gants ?... Je finis par me débrouiller comme je peux en utilisant la neige (ça, ça va, il y en a à profusion!) mais le résultat n'est que moyennement convaincant. C'est là que je penserai à mon frère, et à cette publicité pour les Ferrerro rochers blancs (ceux à la noix de coco) où une neige de noix de coco tombait sur des gens en tenue de soirée apparemment ravis de l'aubaine... et au fameux "Imaginez qu'une neige de coco..." qui nous faisait beaucoup ricaner. Je n'en dirai pas plus, ceci est une private joke entre mon frère et moi ! XD
Pour finir cette histoire, donc, la grille redevenue présentable, les gants et les toilettes nets (de loin, en tout cas), me voici repartie pour de nouvelles aventures, puisqu'il reste les trois quarts des toilettes à vider. Je les porte jusqu'à la grille que j'utilisais depuis le début, mais celle-ci est également bloquée par le gel. Je ne retente pas (même écartement des barreaux) et finis par trouver, un peu plus loin, un caniveau dans lequel, enfin, je pourrai terminer ma mission. Je rentre au camion et nettoie consciencieusement toilettes et gants avec des lingettes antibactériennes. Et j'en utilise plein, pour me venger ! Et j'en ai rien à faire de la nature et de l'écologie ! Elle m'a demandé, la Nature, si ça me dérangeait de vivre sans eau depuis une semaine ?! Non mais oh !
J'en veux à la terre entière pour ce moment vraiment nul que je viens de passer, et même à ce débile de Nietzsche, avec ses étoiles qui dansent : ah ça se voit qu'il n'a jamais dû vider des chiottes par temps de gel, lui, hein ! XD
Ce brillant épisode m'aura pris un certain temps, plus le temps de travailler maintenant, je finis vite de ranger le camion pour que Didier puisse aller prendre de l'essence et je sors carton de vaisselle et bouteilles d'eau à remplir pour m'occuper le temps qu'il revienne. Comme je sais qu'il me restera une bonne heure lorsqu'il reviendra je vais aussi faire des courses vite fait : un pack d'eau en prévision de la prochaine place, un sandwich et un sachet de salade pour manger tout à l'heure sur la route, et je mets à profit cette heure qui me reste avant le départ pour ressortir les cahiers et préparer la journée de classe de demain.
Nous partons enfin pour La Flèche : le temps est bien sec mais les températures sont toujours fort négatives, la neige tassée s'est transformée en grandes plaques de glace, un vrai bonheur !

Le départ des convois sera compliqué : déjà la moitié des cales sont collées au sol par le gel, il faut les en déloger à coup de masse ! La graisse de la grande marche de la caravane d'Hélène et Didier a gelé aussi : nous poussons comme des damnés pour la rentrer, elle a toujours été un peu dure mais là nous aurons bien du mal alors que nous sommes six dessus ! Nous finissons par nous mettre en route. Au-revoir les filles du Champilambart ! Merci pour votre accueil !

Nous commençons à avancer et, quelques rues plus loin, Didier nous informe dans la CB que Carole est coincée sur la place : ça dérape trop ! Nous hésitons un moment en roulant tout doucement (faut-il faire demi-tour?...), mais finalement la situation semble se débloquer : elle avance, certes très lentement, mais elle avance !
La route passe assez vite, sans soucis et avec des paysages enneigés vraiment magnifiques :






Et deux aires d'autoroute au nom rigolo :


Alors que nous sommes à une quinzaine de kilomètres de La Flèche il se met à neiger un peu : heureusement ce ne sont que quelques flocons et nous y sommes presque. En arrivant sur le place les flocons redoublent et surtout il y a un vent glacial qui nous fait bien souffrir. Je crois que je n'ai jamais vu un traçage aussi rapide ! On court avec les pots de plâtre et les sangles, dents serrées.

Il n'y en a qu'un qui semble détendu, avec son super bonnet en poils d'ours, c'est Jean ! "T'as vu, il est content, lui, il n'a pas froid... bon, faut dire, il est Suisse, aussi !..." me souffle Gino. :-D

Quand je rentre dans le camion, il fait exactement... 5°C ! Vite, chauffages à fond, soupe brûlante et mode survie enclenché !

Ah ça, on s'en souviendra, de cette tournée d'hiver !