Ce matin j'entends un bruit de sac plastique assez insistant devant ma porte. Au départ je pense que c'est celui que j'installe pour protéger le tableau électrique, mais je trouve le son vraiment fort par rapport à d'habitude. Je jette un coup d'oeil et trouve ceci sur mes marches :

J'apprendrai plus tard que c'est Augustin qui va chercher le pain le matin et qui en rapporte régulièrement aux autres. Bon... Merci pour ce bon pain frais au petit-déjeuner !

L'après-midi nous retournons à la bibliothèque : comme il ne fait pas très beau je décide d'y aller avec le Master, et je serai bien inspirée car Hubert choisit des espèces de pavés de cinquante centimètres de haut et cinq d'épaisseur qu'il aurait été douloureux de porter sur tout le chemin ! En rentrant au cirque et en me garant, j'hésite un instant à passer sur les tuyaux d'évacuation de Bernard et Sylvie qui sont dans le passage, puis je me dis que ce n'est pas très grave si je roule dessus, c'est du tuyau d'arrosage donc mou et ça ne devrait pas risquer grand chose... Je choisis donc le chemin de la facilité pour éviter la manoeuvre et roule dessus. Et là... ça fait "schkrack" !!! Augustin regarde par la fenêtre et me dit "Haaaan, t'as cassé le tuyau de Bernard, il est tout explosé!" Plom plom plom... Je vais voir les dégâts : en fait il y avait au bout du tuyau jaune mou "normal" un second tuyau gris en PVC... Que je n'avais pas vu...

Bon... D'accord... J'avoue... Pas terrible ! Ceci dit ça faisait longtemps qu'il ne m'était rien arrivé, je suis sûre que mes petites boulettes manquaient à tout le monde ! XD
Et je tiens quand même à signaler quelque chose : si vous observez bien il y a DEUX endroits cassés, or ils sont trop éloignés pour avoir été faits avec une roue, et trop proches pour que ce soit le fait des deux roues...

Je demande donc une expertise pour trouver le second coupable ! Parce que c'est un peu facile de tout remettre sur le dos des autres, non mais oh ! XD
Je suis un peu penaude et vais voir Bernard pour lui expliquer ma bévue, mais en même temps ça faisait longtemps qu'il n'avait pas pu se moquer de moi, je suis sûre que quelque part ça lui fait plaisir ! Bon, et puis il le dit lui-même, "Quand je l'ai installé je me suis dit que c'était une connerie!"
Le soir Jean me propose d'aller boire un verre en ville : nous serons assez étonnés de voir des gens avec des grands chapeaux verts, des noeuds papillons à paillettes vertes... Nous pensons un moment qu'il doit y avoir un match de quelque chose ou bien que les Bordelais s'habillent juste étrangement... jusqu'à ce que je réalise que c'est aujourd'hui la Saint-Patrick ! Ce qui est très drôle c'est qu'en ce moment, en anglais, je travaille sur l'Irlande avec les trois petits, et que je leur avais justement parlé rapidement de cette fête, du trèfle etc... Le lendemain matin, je m'empresserai donc de leur raconter ça ! (sans trop m'apesantir sur le côté bière !)
L'après-midi nous fabriquons des masques car je me dis parfois que je ne fais pas suffisamment de bricolage un peu ludique. J'ai montré quatre modèles aux petits et leur ai demandé de choisir celui qu'ils voulaient faire. Hubert et Firmin ont choisi tous les deux un masque de renard, et Gabrielle un masque-papillon. Je vous laisse admirer le résultat :

Petite anecdote concernant la classe, venant cette fois d'un échange avec Augustin. En Sciences il travaille actuellement sur le système sanguin du corps humain. Il me récite une leçon là-dessus et me donne les facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires : nourriture trop grasse, alcool, tabac, pas assez de sport. Je lui dis "tu as oublié le stress, aussi". Je vois ses yeux s'arrondir et me dire "Ah bon ?! Quand on est stressé on risque de tomber malade ?! Mais euh... Moi je suis stressé, en ce moment, avec la première qui approche !" Trop marrant... Il a fallu que je le rassure !
Le soir un petit tour de courses avec Carole, un gros rattrapage du retard sur le blog... et voilà, il est 23 heures sans que j'ai rien vu passer ! Allez hop, au lit avec un bouquin ! Je vais d'ailleurs en commencer un nouveau car j'ai terminé celui de Giono que j'avais eu à mon anniversaire.

Je l'ai vraiment beaucoup aimé, l'écriture est à la fois simple et recherchée, avouez qu'il faut être balèze pour écrire une phrase comme "Le clocher vient de jeter au vent les dix graines de l'heure nocturne"... Non ?... Moi ça m'emmène, ce genre d'écriture. Et d'ailleurs hop, un peu de culture ne fait pas de mal, je ne résiste pas à vous recopier un passage de l'histoire qui m'a le plus marquée, avec un petit dérapage dans le fantastique qui m'a bien plu. Elle s'intitule "Prélude de Pan".

L'Homme avait la colombe sur son épaule. Il se tourna vers elle et lui parla dans le langage des oiseaux. Il soupira. La large main de Boniface était toujours tendue de son côté.
- Allons...
- Je la garde, dit l'homme.
- Ca ! eut seulement le temps de dire Boniface tant il était comme écrasé par le sang-plan de l'homme, ça alors !... et il se dressa en faisant craquer la chaise. Il était dans notre salle à boire, debout comme un tronc de chêne. Et il resta comme ça, parce que l'autre continuait, de sa petite voix tranquille. Cette voix, dès entendue, on ne pouvait plus bouger ni bras ni jambes. On se disait : "Mais, j'ai déjà entendu ça ?" et on avait la tête pleine d'arbres et d'oiseaux, et de pluie, et de vent, et du tressautement de la terre.
- Je la garde, disait l'homme. Elle est à moi. De quel droit, toi, tu l'as prise, et tu l'as tordue ? De quel droit, toi, le fort, le solide, tu as écrasé la bête grise ? Dis-moi ! Ca a du sang, ça, comme toi ; ça a le sang de la même couleur et ça a le droit au soleil et au vent, comme toi. Tu n'as pas plus de droit que la bête. On t'a donné la même chose à elle et à toi. T'en prends assez avec ton nez, t'en prends assez avec tes yeux. T'as dû en écraser des choses pour être si gros que ça... au milieu de la vie. T'as pas compris que, jusqu'à présent, c'était miracle que tu aies pu tuer et meurtrir et puis vivre, toi, quand même, avec la bouche pleine de sang, avec ce ventre plein de sang ? T'as pas compris que c'était miracle que tu aies pu digérer tout ce sang et toute cette douleur que tu as bus ? Et alors, pourquoi ?
On était tous comme des bûches mortes alignées au bord du chemin.
- Il est fou, celui-là, dit Boniface.
- Non, il n'est pas fou, redit l'homme, c'est toi qui es fou. N'est-ce pas folie que de meurtrir ça, vois !
Il prit délicatement la colombe sur son épaule. Il avait des gestes doux, avec elle. Elle était là, dans ses mains à roucouler tout gentiment. Et il déploya la pauvre aile morte, et il la faisait voir à tous, ballante, sans vie, comme une chose retranchée du monde. Et nous, nous avons fait alors : Oh ! Oh ! tous ensemble. Et ça n'était pas à la gloire de Boniface.
- Encore une fois, qu'il fait le gros, tu me la rends, ma bête ?
- Je t'ai dit : non. Je la garde. Tu t'en sers trop mal.
Alors on les regarda, parce que, Boniface, on le connaît. C'est pas un trop mauvais garçon, mais quand on le bute, quand on y va trop par le revers, ma foi, il n'est pas le dernier à sortir ses poings. Et on pensait : il est allé un peu fort, l'étranger.
Antoine parut sur le seuil de la cuisine.
La salle à boire n'est pas très grande ; d'un pas, Boniface pouvait être au fond. Il fit ce pas, il dressa son bras qui était comme une branche maîtresse, son poing au bout comme une courge...
Et il resta, comme ça, le bras en l'air.
L'homme avait replacé la colombe sur son épaule. Il avait eu pour elle un petit murmure, comme pour lui dire : n'aie pas peur, reste là. Et il avait tourné vers nous sa face de chèvre avec ses deux grands yeux tristes allumés. Il resta un moment à réfléchir, l'oeil sur nous. Puis il se décida.
- Autant dire qu'il faut vous enseigner encore un coup la leçon, fit-il. Peut-être que dans le mélange vous retrouverez la clarté du coeur.


Voilà ! J'arrête ici, à vous de lire la suite si ça vous donne envie. ;-)