Samedi, la mission de la journée est de faire un temps de "fausse école". En effet, mardi une journaliste de Ouest France était venue assister au montage. Ayant appris qu'il y avait une école au sein du cirque elle avait voulu voir comment ça se passait et avait été emballée. On avait pas mal discuté et elle avait pris des photos :

Mais, ayant réussi à vendre son papier pour la "grande" édition (son article aurait normalement dû figurer dans les pages de Flers), il fallait refaire des photos avec le photographe pro (ils sont deux pour toute la région)... qui ne pouvait venir qu'aujourd'hui, en début d'après-midi. Je vous laisse imaginer comme nous étions tous très motivés... Les enfants, à l'idée de devoir arrêter leurs jeux, et la maîtresse devant la perspective de gérer les six loulous comme ça à l'arrache, sans réelle matière à travailler. Comme prévu ils sont bien excités, et moi encore à moitié malade (bizarre cette gastro qui s'en va et repasse faire un petit coucou au cas où on l'aurait oubliée)... Heureusement le photographe est très sympa et la séance sera assez rapide. Je pense que les photos prises dans la classe seront bien, mais quand il essaie de nous prendre devant l'école du camion les enfants ne sont vraiment plus motivés (en particulier Hubert, qui n'est absolument pas décidé à faire le moindre effort : "Non mais oh, déjà vous me faites revenir le samedi, vous ne voudriez pas que je sourie, non plus ?!" )
Le photographe leur rend enfin leur liberté, ils disparaissent comme une volée de moineaux et je discute deux minutes avec lui. Au moment où il repart, il tombe en arrêt au bout du camion, devant le chapiteau. "Ah mais c'est làààà qu'il fallait faire la photo de classe ! Tu ne voudrais pas aller les rechercher, s'il-te plaît, juste deux minutes, c'est vraiment cette photo qu'il me faut !" Euh... J'ai le droit de dire non ?! XD
Il insiste et je repars à la recherche des enfants. Evidemment ils sont de nouveau dans leurs jeux et n'ont pas envie de revenir. En plus je n'en trouve que deux, leur dis d'aller chercher les autres, ils traînent et ma patience commence à s'émousser (parce que bon, dans l'absolu moi aussi ça me gonfle, en fait... Trouver de la motivation pour moi est déjà difficile, mais je n'en aurai pas assez pour sept, ça c'est sûr!) C'est là que j'apprends que trois enfants viennent de partir faire des courses avec Carole. Bon, eh bien comme ça c'est réglé ! Le photographe hésite à leur courir après dans la rue et finit par repartir la mort dans l'âme, je crois qu'il ne se pardonnera pas d'avoir loupé cette image qu'il avait déjà en tête !
J'avoue que je reste relativement insensible à son malheur, car ça y est, je suis vraiment en week-end ! J'ai envie de bouger du campement et d'aller me promener seule au hasard des rues, ça fait bien longtemps que ça ne m'est pas arrivé et je crois que ça me manque.
Je prends mon sac à dos, mon appareil photo, et c'est parti ! Avant de quitter le campement, une petite photo de mon camion : je savais qu'ils s'en étaient servi pour accrocher le chapiteau, mais je n'avais pas vu le nombre de sangles ! Je comprends mieux pourquoi Hélène m'avait dit, à propos du placement de mon camion : "Faut juste espérer qu'il n'y aura pas trop de vent" !

La ville de Flers me fait une drôle d'impression, elle semble être un melting-pot de tout un tas d'époques et de modes et me fait penser à une adolescente qui aurait grandi trop vite et de façon un peu anarchique. Intriguée par cette sensation, je ferai en rentrant quelques recherches qui me permettront de voir que ce n'était pas qu'une impression. En effet, Flers est longtemps un bourg provincial de taille plutôt réduite. C'est au 19ème siècle que la ville prend un essor très important, avec la révolution industrielle et plus particulièrement l'industrie textile. Si vous observez le blason de la ville, vous y verrez d'ailleurs deux navettes et trois bobines, qui indiquent bien l'importance du textile pour la ville.

Au 19ème siècle, donc, la ville va voir sa population quadrupler en moins de 80 ans, ce qui entraîne de nombreux aménagements encore visibles aujourd'hui : implantation d'usines, construction de logements ouvriers mais aussi d'immenses maisons bourgeoises, arrivée du chemin de fer...
L'autre événement qui modifiera profondément le visage de la ville est la seconde guerre mondiale, dont les bombardements détruisent à plus de 70% le centre ville.
Plus tard, la crise des années 70 marque profondément l'économie locale, avec 4 000 suppressions d'emploi en quelques années et un taux de chômage qui bondit. Depuis plusieurs années, cependant, la tendance s'inverse, avec une économie à beaucoup plus petite échelle, mais dynamique. Voilà pour le canevas historique, qui vous permettra de mieux comprendre certaines photos !
Je commence par visiter l'Eglise Saint-Germain, qui a un petit air de Notre-Dame de Paris (en plus petit et plus sobre!).

Construite dans le premier quart du 20ème siècle, elle m'impressionnera surtout par ses vitraux, très modernes, qui me plaisent bien :

Juste un petit bémol pour ces vitraux-ci :

Mais euh... quelle idée, franchement ! Pour leur inspiration j'hésite entre les années 70 et la maternelle... XD
Je trouve la rosace, en revanche, assez magnifique :

Un petit détail qui me fera bien rire : au milieu de toutes les affiches et autres prospectus "La messe en famille", "Préparation au mariage", "Jésus est parmi nous", "Cours de catéchisme pour adultes"... voici une affiche qui détonne un peu !

Je ressors de l'église et photographie le marché couvert, dont les fondations reposent sur des pieux de sapin en raison de l'instabilité du terrain initial. En effet, il a été édifié sur... l'ancien cimetière.

Un peu plus loin, en passant devant l'Office de tourisme, je vois que Carole et Gino ont vraiment bien préparé notre arrivée : en plus des multiples affiches visibles partout dans la ville, voici une belle vitrine, dans laquelle vous reconnaîtrez un trapèze et l'accordéon de Gino !

Je continue ma promenade au hasard des rues, là où m'appellent mes yeux, avec de belles maisons, d'autres en bien mauvais état, et un petit clin d'oeil aux amateurs de Loïc Lantoine ("Et on ouvrira p'têt un bistrot, comme un boxeur, comme un cycliste, comme un ouvrier à la retraite. Et on ouvrira p'têt un bistrot pour kidnapper la fin de la fête...")

Je profite de mon passage devant la médiathèque pour aller me poser au chaud et bouquiner un peu pendant une demi-heure, et tombe en ressortant sur cette bien étrange demeure (qui accueille aujourd'hui l'Ecole de Musique) : le Château Duhazé.

Nommée d’abord villa Gallet, cette propriété, construite par l’architecte François Liger, fut ensuite rachetée par Joseph Duhazé, grand industriel du textile flérien dont elle a conservé le nom. De style néoclassique, les façades sont constituées de brique, pierre calcaire et granit, dont le mélange lui confère une allure très particulière.

Je vous laisse admirer les différents détails repérés, avec différentes influences (animalier, arts-déco, bucolique... y'en a pour tous les goûts!) :





Je ne peux terminer ce compte-rendu sans vous faire part d'une grande découverte (je ne savais même pas que des vrais gens mettaient ça dans leur vraie maison). Regardez donc cette maison, et sa petite haie bien taillée devant :

Eh bien approchez-vous un peu, et vous comprendrez ma stupeur :

Une haie d'arbustes en plastique ! Vous saviez que ça existait, vous ?! Je ne m'en remets pas... :-o
Cette balade m'aura fait un bien fou, je me suis oxygénée et reviens en pleine forme au chapiteau. Le soir je garde Marius et nous buvons un verre au bar après le spectacle. Voilà l'occasion pour moi de vous montrer quelques photos prises par Didier, afin de vous faire goûter un peu à l'ambiance du lieu :

Voici une autre photo, prise par Didier et qui me plaît bien : mon camion et ses beaux rideaux devant le chapiteau illuminé !

Dimanche chacun s'occupe : je fais mon blog, un brin de ménage et prépare la classe, notre petit facteur effectue une tournée en tenue, Mamie Monique passe l'aspirateur sur la piste et Didier nettoie mon camion.

Le spectacle est à 16h, ce qui bloque presque tout l'après-midi. Marius dort une bonne partie du spectacle, je l'entends ensuite jouer tranquillement dans son lit. Généralement il reste ainsi un moment, puis quand il en a marre il appelle pour qu'on vienne le chercher. Là, j'entends bien qu'il est réveillé, mais il n'a pas l'air décidé à se lever. Au bout d'un moment je me dis que je vais aller le lever quand même (il est plus de 17h!), il n'a pas l'air très motivé ! Je le change puis l'habille, et au moment où je termine le double-noeud de sa deuxième chaussure... Didier arrive pour se laver les mains (ce qui signifie qu'il a fini son numéro de trapèze avec Hélène) et me dit "Hélène se disait que ce serait sympa d'amener Marius pour le final, s'il est réveillé tu peux lui mettre une belle chemise et nous l'amener". Plom plom plom... je tiens quand même à témoigner de la grande patience dont fera preuve Marius (si si, ça lui arrive, d'être patient!), car il ne doit pas bien comprendre pourquoi je le redéshabille complètement, troquant ses bottes, son jean, son pull et ses chaussettes en laine contre un joli pantalon noir, une chemise assortie, des petites chaussettes rouges et des chaussures noires ! Après le spectacle les Morallès rangent une bonne partie du décor. En effet demain il y a peu de bénévoles prévus pour le démontage, et comme la route se fera l'après-midi il serait préférable que ça aille le plus vite possible. Pour ma part je vais relever mes mails pour avoir les dernières consignes envoyées par les enseignants des enfants et préparer la matinée de classe.
Nous dînons tous ensemble sous le petit chapiteau. Carole et Gino peuvent enfin relâcher un peu la pression : il faut souligner, en effet, que c'est en grande partie eux qui ont préparé et géré cette tournée un peu particulière, et je crois qu'ils sont à plat (bizarrement, ils n'ont plus de voix ni l'un ni l'autre!). La fin de soirée sera malheureusement moins gaie que le repas : Ali, la plus petite des chiennes de Carole, se fait renverser par une voiture tandis que nous terminons le repas sous le petit chapiteau. Le conducteur allait doucement mais Ali est toute petite et fragile : malgré la venue d'un vétérinaire elle ne survivra pas à l'accident.
C'est Gabrielle qui vient me l'annoncer lundi matin, un peu avant le début de la classe : je prends cinq minutes avec elle pour en discuter car je sens qu'elle a besoin d'en parler. La classe passe vite et il est bientôt l'heure de faire les cartables. Je ne pourrai pas vous raconter le voyage de retour car je repars en train, pour avoir un peu plus de temps avec Bruno à la maison...
Le midi Mamie Monique a préparé des croque-monsieurs pour tout le monde, au départ je me dis que je n'en prendrai pas car j'ai déjà fait des sandwichs pour le train. Mais au moment d'aller lui dire au revoir, elle me dit, tout en rentrant dans sa caravane pour prendre un petit paquet en papier alu :
- Ah, tu tombes bien, j'ai préparé des croque-monsieurs, je vais te donne le tien.
- C'est très gentil Mamie mais je pense que je vais le laisser à quelqu'un qui voudra du rab parce que j'ai déjà de quoi manger.
(Elle ressort avec le croque-monsieur emballé.)
- Tiens, en plus tu as de la chance, figures-toi que je t'avais complètement oubliée sur ma liste quand j'avais compté le nombre de gens, mais comme j'en avais fait un en plus tout s'arrange !
- Mais Mamie, en fait j'ai des sandwichs que j'ai préparés pour le train, alors je vais vous le laisser et comme ça si quelqu'un en veut en plus, par exemple chez Didier...
- Tu ne veux pas du croque-monsieur que je t'ai préparé ?!
- Eeeuuuh... (gloups) Si si Mamie, je vais le prendre ! Merci beaucoup !
Eh oui, avec Mamie Monique faut pas rigoler avec la bouffe ! Ceci dit j'ai bien fait de le prendre (il y en avait deux, d'ailleurs!) car je me suis régalée !
Dernières vérifications dans le camion (tout est bien accroché, c'est bon ?...), puis direction la gare de Flers. Rendez-vous le week-end prochain (eh oui, la pause est courte) pour de nouvelles aventures !