La matinée est un peu difficile : mon corps se rebelle et m’explique qu’il manque de sommeil en s’autorisant du rab de dodo. Et en plus : il pleut ! Remarque, vu le super temps qu’on a eu depuis le début de la tournée je ne vais pas me plaindre !
Du coup, pendant la récréation, comme nous sommes coincés dans le camion, les enfants me demandent si on peut sortir la pâte à modeler. Ils vont même avoir droit à une récré plus longue que d’habitude parce qu’ils sont trop mignons ! Ils jouent ensemble, tous les cinq, sans disputes. Léon et Augustin ont pris en main la direction des manœuvres : ils disent aux plus petits ce qu’ils doivent faire, et ces derniers s’exécutent ! Ils fabriqueront une bien jolie maison, dans son jardin entouré de barrières, avec arbres fruitiers et fleurs sur le gazon, s’il-vous plaît !

Et ils ne rechigneront même pas quand je leur demanderai de ranger. C’est assez chouette de les observer, de voir les rapports qu’ils ont, les « alliances » qui se font et se défont. Je crois qu’ils auront des rapports assez forts, plus tard, ces cousins-là !


Je profite d’ailleurs de l’occasion pour vous donner la recette de la pâte à modeler. Eh oui, car il y a une recette toute simple pour la faire soi-même, c’est Hélène qui m’a filé le tuyau (argh, non, c’est vrai, depuis mes mésaventures d’hier je ne veux plus entendre le mot « tuyau » !)
La pâte à modeler industrielle est d’une façon générale assez chère (surtout si on veut avoir plusieurs couleurs). Du coup, quand votre chère petite tête blonde a oublié de refermer le pot ou en a laissé traîner un gros morceau sous la table, la vue de la pâte toute dure et dont le seul avenir se situe désormais dans la poubelle a une légère tendance à vous énerver… logique…
Heureusement, Zorro est arrivé (et sous le masque : Hélène), avec sa recette de la pâte à modeler !


Le soir, j’ai décidé qu’il fallait absolument que je m’entraîne à conduire le Master (un des utilitaires du cirque), car je serai amenée à le prendre pour faire des sorties avec les enfants quand il n’y aura pas d’autre moyen de transport. De plus, Bruno arrive jeudi soir à Nantes et je lui ai dit que j’irais le chercher là-bas (nous serons alors à Vallet, la prochaine place, à environ 25 kilomètres de Nantes). Je prends mon courage à deux mains. Destination : le musée Robert Tatin, où nous irons demain après-midi avec les enfants. C’est à deux kilomètres à peu près, je me dis que ça suffira amplement pour une première fois ! (oui, moi et la voiture… c’est une longue histoire…)
Je trouve la position des jambes un peu bizarre, on est plus « assis » que dans une voiture, les jambes moins tendues, je crois. Je ne sais pas trop comment il faut régler le siège, je ne suis pas très à l’aise mais toujours accrochée à mon sacro-saint « je vais me débrouiller tout seule »…
« Tu verras, ça se conduit comme une voiture ! » m’a dit Bernard. Bon en même temps, lui il conduit un 32 tonnes alors forcément…J’ai à peine démarré que ça commence : je tourne trop court pour sortir de l’emplacement et ça frotte une remorque qui est garée juste à côté. Dans le rétro, je vois Sylvie et Anaïs, qui prenaient un thé dehors et qui tendent le cou pour voir ce qui a fait ce bruit. Je tourne vite le coin du hangar qui est là pour me soustraire à leurs regards et, une fois à l’abri, je m’arrête pour évaluer les dégâts. Heureusement ça a très peu frotté et il n’y a même pas de marque sur la carrosserie. Là, je ressens la très forte tentation de ne pas y aller : je le savais bien, ce n’est pas fait pour moi ces engins-là, je n’y arriverai pas.
Et en même temps, je me dis que si je renonce maintenant je resterai sur un échec et j’aurai du mal à réessayer sans trop d’appréhension. « Allez, remue-toi un peu, sors de ta peur (l’expression qui me vient à ce moment-là est même un peu plus grossière que ça : les fans de Kaamelott saisiront tout de suite !), BOUGE-TOI ! »
Je reprends donc le volant et finis par arriver au musée. Bon d’accord j’ai roulé à deux à l’heure et embêté tout le monde, mais je l’ai fait ! Au retour, je n’ai pas le courage de faire une manœuvre pour bien me garer dans le parking. De toute façon Bastian et Maurice l’attendaient pour aller faire des courses, je m’arrête donc un peu à l’arrache et sors, les jambes un peu flageolantes (à un moment, je ne sais pas si ça a à voir avec une mauvaise position que j’ai prise ou le stress, mais j’ai bien cru que j’allais avoir une crampe au mollet !).
« Alors ? » me demandent ceux qui prennent un thé au soleil. Je regarde Bernard et réponds « Ouais bin ça ne se conduit pas tout à fait comme une voiture, quand même ! »
Johanna me dit « Ah t’as l’air de t’être tapé des bons flips quand même ! » Arf… Je crois que ça va finir par se voir, que je suis une handicapée manuelle !


Du coup, le soir, je cherche sur internet les horaires de bus pour faire Nantes-Vallet : je ne le sens pas, mais alors pas du tout d’aller chercher Bruno à la gare de Nantes ! Ce n’est pas tant la distance que de conduire dans cette grande ville : si ça avait été dans un petit bled peut-être, à la rigueur, mais là c’est au-dessus de mes forces, je ne m’en sens pas capable, je voudrais d’abord le conduire plusieurs fois, pour le prendre en main tranquillement, à mon rythme (…de limace !).
Heureusement Bruno a l’air de comprendre et ne se moque pas de moi comme j’aurais pu le craindre. Il ajoutera donc cinquante minutes de bus aux quatre heures et demie qu’il faut déjà pour faire Chauvigny-Poitiers puis Poitiers-Nantes… J’ai un peu honte…


Plus tard, Anaïs passe me proposer de venir regarder un film dans sa caravane, avec Johanna et Bastian. Ils sont souvent ensemble, ce sont les trois « jeunes » du cirque (plus ou moins célibataires et sans enfants, quoi). J’hésite un peu car je sais que je ferais bien de me coucher tôt pour rattraper mon sommeil en retard, mais en même temps ça me fait plaisir qu’ils m’aient proposé de me joindre à eux. En plus j’ai terminé de préparer ma journée de demain, ça me sortira un peu la tête de la classe. Nous regarderons « The reader » en buvant une tisane et en grignotant une crêpe, puis nous discuterons un certain temps pour savoir si le personnage principal est un « lâche », comme le soutient un Bastian très remonté, ou si il est excusable de sa conduite. Nous ne tomberons pas vraiment d’accord !
Ça faisait longtemps que je n’avais pas passé une soirée comme ça, c’est agréable. D’accord, demain je crois que le réveil sera difficile… histoire de changer !