Se pourrait-il qu’au fur et à mesure que se déroulent nos rubans de vie, notre passage sur la toile du temps nous suggère d’ajuster et d’adapter notre regard aux nouvelles réalités que nous dévoile la vieillesse ?

La première et sans doute la plus fondamentale de ces réalités est que nous consacrons une vie entière et une somme colossale d’énergie à apprendre, à se doter d’outils de toute nature pour mieux comprendre et saisir les réalités et l’univers qui nous entourent pour enfin réaliser en fin de parcours que nous ne savons à peu près rien, tant le savoir humain est vaste, infini et complexe et que les grands mystères de la vie demeurent entiers. En d’autres termes, on apprend, on étudie, on cherche, on lit et on réfléchit pendant 75 ans pour réaliser que l’on ne sait à peu près rien. Quel paradoxe !

La deuxième, et c’est probablement parce que l’on approche du crépuscule de nos vies, que l’on parcourt les derniers chapitres de nos histoires, c’est le caractère précieux et le grand privilège de la vie. Enfant, on commande à l’univers de nous obéir ; adolescent, frondeur et insouciant, on dépense nos énergies comme si nos réserves étaient illimitées. Adulte, on porte courageusement le fardeau des responsabilités familiales et du marché du travail dans le cadre d’une survie économique fragile.

Un grand privilège

Et tout à coup, on se réveille retraité pour comprendre comment chaque moment et instant de vie qui nous est accordé est précieux, un grand privilège à goûter et dont il faut être profondément reconnaissant, pleinement conscient qu’en ces temps modernes que nous traversons, les contraintes du nouveau contexte dans lequel nous vivons auraient fait que nous n’y aurions pas eu accès (septième survivant de dix naissances, né en 1942).

La troisième dimension de ce nouveau regard est le passage de la certitude et de l’acquis à l’incertitude et à la relativité de toutes les réalités qui nous entourent. En vieillissant, non seulement et c’est probablement dû à l’expérience acquise et au recul que suggère cette dernière, on devient plus critique et plus sceptique par rapport aux vérités et aux absolus qui nous ont animés tout au cours de notre vie. Mais on perçoit aussi avec plus de lucidité toute la relativité de ce qui nous entoure et a servi à nous définir et nous identifier dans le passé.

On réalise que tout est en mouvement, en changement, en transformation et en évolution et que ces réalités d’hier ne sont plus pertinentes, n’ont plus la même assurance et n’offrent plus les mêmes garanties et que leur fondement est plus qu’ébranlé et fissuré.

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