La longue marche des femmes

En France, la lutte pour l'égalité des droits des femmes et des hommes est devenue plus évidente après la Révolution de 1789, mais les femmes n'ont reçu le droit de vote qu'à la fin de la seconde Guerre mondiale, le 21 avril 1944. La plupart des femmes reçoivent encore un poste ou un salaire moins élevé que les hommes, même si elles sont plus capables. Trop nombreux sont les hommes qui se croient supérieurs, qui ont une relation de mépris envers les femmes ou qui les sous-estiment. Bien que cette situation ne soit ni bonne ni idéale, elle peut apparaître enviable pour beaucoup de femmes dans d'autres pays.

Nous pouvons suivre maintenant l'évolution de la lutte de femmes pour l'égalité des droits à travers le monde. Le viol continue d'être un fléau pour les femmes. La situation est plus abominable dans des pays en guerre, entre autres au Kivu, dans la partie orientale du Congo démocratique. Une immense colère s'exprime maintenant en Inde après la mort d'une jeune femme qui a été durant un long moment victime non seulement d'un viol collectif mais aussi d'une bastonade sauvage. L'excision pour les fillettes continue d'exister à cause de traditions, de la religion et de superstitions. Il existe une tolérance, une acceptation et un silence sur la souffrance sexuelle féminine mais des tabous sur le même droit que pour les hommes au plaisir sexuel. Le combat d'une jeune fille pakistanaise de 15 ans, Malala Yousafzai — très grièvement blessée par des talibans du fait qu'elle exige le droit pour les filles de fréquenter des écoles et de recevoir une éducation identique à celle des garçons — reçoit un grand écho. Il y a beaucoup de soutiens à travers le monde pour qu'elle soit proposée pour le prix Nobel de la paix 2013.

Depuis que Bertha von Suttner, d'Autriche, a reçu le premier prix Nobel de la paix, en 1906, il a été attribué à quatre femmes seulement durant la première période de 25 ans. Environ un siècle plus tard, de 1976 à 2000, elles étaient 15, et 14 de 2000 jusqu'à maintenant. Contrairement à la science et à la technique qui évoluent de plus en plus vite du fait d'exigences de rationnalité et de raisonnement, la mentalité humaine stagne ou régresse même parfois en raison de comportements irrationnels, de préjugés, de supersitions, de dogmes religieux dont les inventeurs ont toujours été des hommes.

Pionnier dans le domaine de l'égalité des droits linguistiques et de la justice dans la communication linguistique entre les peuples, le monde de l'espéranto a eu aussi des pionniers et des soutiens masculins pour les droits de la femme, entre autres William Stead, le journaliste et éditeur, trésorier du Club d'Espéranto de Londres, qui périt en 1912 lors de la catastrophe du Titanic. Il défendit les femmes contre le viol et fut le premier chef d'entreprise qui embaucha des femmes avec un salaire égal à celui des hommes. Le fameux bactériologue polonais Odo Bujwid milita beaucoup avec son épouse Kazimiera pour les droits de la femme et l'espéranto. Une traduction du livre “Marta“ de l'écrivaine polonaise Eliza Orzeszkowa effectuée par le Dr Zaemnhof parut en 1910 en espéranto. Sa traduction et publication en japonais permit à des femmes japonaises de prendre conscience de la nécessité de l'émancipation. Des groupes féminins d'espéranto existaient au Japon. Le Klara Rondeto (Cercle Klara, d'après le prénom de l'épouse du Dr Zamenhof) fut fondé le 12 avril 1925. D'autres groupes féminins d'espéranto existaient aussi à Yokohama (Amikino = Amie) et Osaka (Orkidaro = Orchidées). Un recueil de 125 pages d'articles originaux et traduits de Macue Sasaki — “Vortoj de Macue Sasaki“ — parut en 1935 sur les souffrances que causent la misère, le militarisme, l'esclavage féminin et autres maux. Le travail du Centre d'Espéranto d'Hiroshima suit aujourd'hui une voie aussi belle.

L'espéranto a souffert durant 125 ans d'existence et souffre encore maintenant du même mépris et de la même sous-estimation que la femme durant des millénaires. La communication sans frontières sur une base linguistique équitable est maintenant une nécessité pour faire progresser l'émancipation des femmes dans le monde entier. La solidarité doit s'exprimer sans frontières. Il est absolument indispensable, où que ce soit dans le monde, que l'éducation permette déjà dès le jeune âge aux garçons et aux filles de s'estimer et de s'apprécier réciproquement, de comprendre leurs complémentarités même si leur façon de voir la vie et le monde, leur perception générale et leur manière de ressentir peuvent être plus ou moins différentes. Une société qui entrave le droit aux femmes de s'exprimer est mutilée; elle est semblable à un borgne.

Au succès de la Journée Internationale de la Femme 2013 d'Hiroshima !

Henri Masson (...)