Ibiza, début des années 90: Jo (Max Riemelt) a vingt ans, il vient de Berlin, il est musicien et veut faire partie de la révolution électronique qui commence. Pour démarrer, l’idéal serait d’être engagé comme DJ dans le plus grand club de l’île, L’Amnesia. De son côté, Martha (Marthe Keller) vit seule, dans sa petite maison face à la mer, depuis quarante ans. Une nuit, Jo frappe à sa porte. La solitude de Martha l’intrigue. Ils deviennent amis alors que les mystères s’accumulent autour d’elle : ce violoncelle dont elle ne joue plus, cette langue allemande qu’elle refuse de parler… Alors que Jo l’entraîne dans le nouveau monde de la musique techno, Martha remet en question ses certitudes…


Présenté en séance spéciale à Cannes 2015, Amnesia marque les retrouvailles de Barbet Schroeder avec l’île d’Ibiza, où il avait tourné son premier film, More, en 1969. Resté dans les mémoires pour la musique de Pink Floyd et pour la vision qu’il donnait de la drug culture des années 70 , More ressort d’ailleurs en simultané dans un certain nombre de salles et pourra se (re)voir comme une sorte de "prequel" d’ Amnesia.
Le personnage féminin, joliment interprété par la toujours émouvante Marthe Keller, pourrait très bien, en effet, avoir été l‘une des jeunes hippies croisée dans More. Il est d’ailleurs inspiré de la propre mère du réalisateur, installée à Ibiza depuis les années cinquante et qui a toujours refusé de parler allemand avec son fils. C’est sa maison, ou est censée habiter Martha, l’héroïne du film, qui fournit le décor principal du film... Multipliant ainsi les passerelles entre fiction et réalité, le réalisateur de 73 ans parvient à tisser brillamment les trois fils de son intrigue : histoire d'un amour platonique entre deux héros séparés par une grande différence d'âge, résurgence du traumatisme nazi pour la génération d'après guerre au moment de la chute du mur de Berlin et émergence d'une nouvelle forme de culture musicale (la techno) à l'aube d'un nouveau millénaire. Du cinéma que l'on pourrait qualifier d' "art et essai" dans sa forme, mais ancré, pour le fond, dans une grande modernité. Amnesia pourra séduire au delà des nostalgiques de More et de Pink Floyd.