La journée de samedi commence par l'annonce du coup de chance de Julie : figurez-vous qu'elle est allée au casino avec Sylvie, hier soir, qu'elle s'est installée sur la même machine que celle où Hélène avait perdu dix euros en dix minutes, et qu'elle a gagné... un peu plus de deux cents euros, quand même ! Le malheur des uns fait le bonheur des autres !
Dans l'après-midi j'ai une discussion avec Pierre-Yves et Jean que je vous relate, car je la trouve très drôle et assez représentative de la difficulté à comprendre un circassien quand on ne l'est pas soi-même. Jean m'explique qu'il a vu une semi qui lui plaît beaucoup et qu'il aimerait acheter. Je me demande dix secondes pourquoi il dit "une" semi et pas "un" (dans ma tête c'est un semi-remorque), mais bon, après tout il est Suisse, me dis-je... je ne cherche donc pas plus loin ! XD Il me parle ensuite des prix, et ajoute qu'au départ le propriétaire voulait vendre la semi avec un tracteur, ce qui l'arrangeait bien, mais qu'il préfère finalement garder le tracteur, donc il n'y a plus que la semi en vente. Et là... il doit y avoir dans mes yeux un vide intersidéral... Je nage complètement, essayant tant bien que mal de faire coïncider :
Jean...

un semi-remorque...

et un tracteur !

J'ai beau chercher... Comprends pas... Pierre-Yves remarque mon expression qui doit être un mélange de concentration et d'incompréhension profonde, et me dit tout à coup "Ah non mais pas un tracteur agricole, hein ! Un tracteur, tu sais, un avant de camion, le truc pour tirer la remorque, quoi !") Aaaaah ! (la lumière s'allume dans les méandres de mon cerveau) En fait son truc qu'il veut acheter c'est une semi-remorque aménagée en caravane, et qui s'accroche donc sur un avant de camion, appelé aussi tracteur !

Bin voilà, faut être clair, aussi ! XD
Quoi qu'il en soit, je ne reste pas sur ces échecs et me contente de mes petites victoires sur l'adversité au jour le jour. Ainsi, je serai très fière de moi quand à la fin de la journée j'aurai fait un peu de bricolage (attention interdiction formelle de rigoler), avec l'installation de crochets que je faisais traîner depuis quelques temps et un réaménagement de certaines choses. Bon d'accord la pendule n'est pas très centrée...

... et l'accroche du papier-toilettes n'est pas hyper droite...

Mais je l'ai fait tout seule, alors je suis quand même plutôt satisfaite ! ("Petit on commence toujours"...)
Autre bonne rigolade du week-end, dimanche : je bavasse dans mon camion avec Jean en faisant des crêpes pour après le spectacle, il regarde les différents cahiers, livres et autres feuilles d'école qui traînent sur la table. Augustin arrive à ce moment-là :
- Tiens, tu fais quoi avec ça, Jean ?
- Bin je fais tes leçons de demain, comme tu étais un peu malade je me suis dit que tu n'aurais pas envie de travailler et que tu préférerais te reposer.
- Mais... Euh... (puis, après un temps de réflexion et ayant compris que c'est une blague) : Ah mais non, en plus c'est le travail de Léon, ça ! (et, se tournant vers moi) : C'est qu'il t'aide parce que tu ne comprends pas, c'est ça ?
Je ne sais pas comment je dois le prendre !!! Je crois que c'est un peu vexant, quand même ! XD
Comme je l'avais promis à Gabrielle, Firmin et Hubert, je les emmène à la plage pendant le spectacle, avec Marius qui s'est réveillé de sa sieste. J'avais prévu de commencer moi aussi une collection de morceaux de verre poli, mais il faut bien le dire : ce ne sera absolument pas possible ! La plage avec Marius c'est sportif, et une occupation à temps plein !
Déjà, il n'a absolument rien à faire du chemin que nous prenons, et décide souvent d'aller voir plus loin comment c'est. Heureusement que la mer est loin, la plage très grande et que je cours plus vite que lui ! Et heureusement aussi que les trois autres, tout contents d'être, pour une fois, "les grands", me filent un coup de main !

Une chose qui m'étonnera beaucoup sera aussi son attitude face à cette étrange matière qu'est le sable. Lui qui se prend régulièrement de bonnes gamelles et ne pleure jamais quand il tombe, cette fois il n'arrêtera pas de chouiner ! Il veut aller vite, tombe immanquablement, et là : impossible de le faire se relever seul, il braille en regardant ses mains pleines de sable d'un air horrifié. Je doute qu'il trouve ça "sale" (l'eau ou la terre ne l'ont jamais trop dérangé), je pense donc qu'il doit y avoir une autre explication... s'il y a un professionnel de la psychologie enfantine dans la salle ça m'intéresse !
Au bout d'un moment (et après l'avoir traité de chochotte à plusieurs reprises, ouh les vilains ! ) nous arriverons à le convaincre que ce n'est pas grave d'avoir du sable sur les mains et que, même, on peut parfois y faire de jolies découvertes... mais ce ne sera pas sans mal, comme vous pourrez en juger par cette série de photos (certaines sont très floues, désolée, il bougeait pas mal et la lumière du jour déclinait) :

En rentrant au campement nous allons dans la caravane de Didier et Hélène pour attendre la fin du spectacle, et les trois "petits-grands" me feront bien rire. J'essaie de calmer un peu Marius, qui est à la fois excité et fatigué par cette promenade à la mer, notamment en lui parlant. Gabrielle apporte la grande panière dans laquelle sont les jouets de Marius.
Moi : Ooooh ! Mais à qui sont tous ces jouets ?!
Gabrielle, Firmin et Hubert, me répondant en choeur, le plus sérieusement du monde : C'est les jouets de Marius.
Je ne relève pas, Gabrielle pose la panière et un petit train qu'il adore, à l'intérieur, se met en marche avec le choc : "Tchou tchooouuu" !
Moi : Ooooh ! Tu entends ?! Qu'est-ce que c'est, qui fait ce bruit ?!
Gabrielle, Firmin et Hubert, toujours d'une seule voix : C'est son petit train Oui-Oui qui s'est allumé.
Moi : Euh... Non mais... Je sais, les enfants ! Les questions je les pose à Marius, mais je connais les réponses !!!
Entre ça et l'anecdote avec Augustin hier... je commence à me poser des questions et me demander s'ils ne me prennent pas réellement pour une demeurée ! XD

Lundi matin c'est le démontage du chapiteau, en classe je revivrai avec Léon un grand moment de solitude, connu il y a deux ans avec Augustin sur le même exercice du même manuel : les compléments circonstanciels de moyen et de manière ! Et ne rigolez pas trop vite, bande de moqueurs ! Oui, je sais, comme ça on se dit qu'on comprend la différence, le moyen c'est "avec quel moyen" (""avec un bout de bois", "grâce à un moteur puissant" etc), et la manière c'est "de quelle façon" ("aussi vite que l'éclair", "de toutes ses forces" etc). Sauf que... dans la phrase "Il se promène à grands pas dans la grotte", que Léon me dise "moyen" ou "manière", j'aurai du mal à le contredire... parce que c'est quand même un peu les deux ! Et qu'il faudrait peut-être arrêter de couper les cheveux en quatre, à un moment ! XD
A midi nous déjeunons tous ensemble, avec l'équipe qui nous a accueillis, puis le moment du départ arrive. Les enfants ont trouvé un bon refuge en attendant la fin des manoeuvres pour que tous les convois soient accrochés :

(Ces canapés avaient été installés par la ville dans le petit chapiteau, où ils avaient installé un bar.)
Au revoir Saint-Pair !

Direction Flers : une centaine de kilomètres, les doigts dans le nez, pensons-nous. Allez, une heure et demie, maximum deux heures de route, à 15h30 on est sur la place ! Mais bien entendu (vous commencez à avoir l'habitude)... il n'en sera rien !
Les premiers kilomètres sont terriblement longs, avec des travaux à plusieurs reprises et des feux qu'on trouve déjà longs quand on est en voiture, mais alors avec huit convois... De mon côté, ce n'est pas la grosse forme : une gastro traîne depuis plusieurs jours, j'ai été vraiment mal vendredi puis ça s'est un peu amélioré pendant le week-end, je me suis donc autorisée à boire quelques bières hier soir et à bien manger ce midi au repas de la commune... et là... je sens que j'ai peut-être un peu présumé de mes forces... Je commence à avoir mal au coeur et au ventre, j'ai super froid, puis tout à coup trop chaud et re-froid, je tremble et me crispe, ce qui me donne une irrépressible envie de faire pipi... Je ne suis donc pas une passagère très agréable pour Jean : muette et pas très rassurante ("Elle va me vomir sur les pieds ou pas ?"). Ajoutez à cela que c'est une petite route (en kilomètres mais aussi en taille et aménagements) et qu'il n'est pas du tout prévu qu'on s'arrête (il n'y a pas vraiment de parking de toute façon) et vous aurez une bonne idée de la situation...
Au bout d'un moment Bastian nous prévient dans la CB qu'il va devoir s'arrêter pour prendre de l'essence. Jean, qui me voit faire des efforts pour respirer calmement depuis une heure et passer régulièrement du vert au blanc aura alors ces quelques mots qu'il regrettera amèrement jusqu'à la fin du voyage : "Tu veux qu'on s'arrête avec eux ?..." Moi : "Oh ouiii s'il-te plaît...". Premier arrêt, donc, à la station d'un petit Carrefour Market (les autres poursuivent leur route, nous nous retrouverons à Flers) : je cours aux toilettes et apprends en revenant que cette pompe est vide. Nous repartons et nous arrêtons à une station dans le bled suivant. Sauf que cette station est située du côté gauche de la route, et que Bastian, en tournant, érafle un peu avec sa caravane une voiture qui était stationnée du côté droit... Le temps de trouver sa propriétaire et de faire le constat... nous restons bloqués un certain temps... Et là je crois que Jean commence à regretter sa prévenance de tout à l'heure ! XD
La fin de cette route sera interminable, notamment quand nous mettrons plus d'un quart d'heure à traverser la petite ville de Vire, tournant et retournant dans tous les sens avant de trouver le bon chemin... Ce trajet tout pourri et mon état un peu maladif expliquera le peu de photos prises. Notons juste, au passage, un petit clin d'oeil pour Yann, avec un village au nom évocateur... (c'est le titre d'un spectacle avec lequel il tourne également)

(Note pour les copains : c'est aussi le titre d'une très belle chanson de Mano, n'oublions pas... Il ne faut pas se tromper de bataille, il ne faut jamais se croire de taille... C’est quand tu ris que t’emporte la mitraille...)

Nous arrivons enfin à Flers, peu avant 17 heures, et je crois que pendant quelques temps Jean ne me proposera plus de venir avec lui ! XD

Bon, tâchons de trouver le côté positif de tout cela : le traçage est déjà fait et les convois sont installés ! Hem hem... Voilà voilà, quoi... Bon bin... sur ce je vais aller directement au lit, moi... Pfiou... Pas la patate... Espérons que ça ira mieux demain !