Je précise que même si la "musicalité" est un peu réfléchie, ce texte n'est pas en pieds, alors inutile de compter.

Pour l'anecdote, je suis content (oui, ça arrive) de la deuxième strophe ou je voulais jouer sur la sensation chaud/froid. Pour l'anecdote toujours, je souhaitais à tout prix recaser une citation d'Horace "Comme la nuit paraît longue à la douleur qui s'éveille" (soufflée par une amie) mais j'ai été incapable de trouver une rime correcte à "longue" (à part tong, ou gong mais bof), alors je l'ai honteusement transformée. J'espère qu'il ne m'en voudra pas trop.



Dans la triste quiétude revenue
Le silence des morts à présent
Se heurte aux plaintes des mourants
Qui, peu à peu convaincus,
Décident à leur tour de se taire
Pour se fondre dans la nuit
Pour se fondre dans la terre
Comme autant de sources taries.


De mon sang la douce chaleur
Inonde mes jambes alanguies,
C’est la blessure crainte et honnie
Que j’ai reçue au champ d’horreur ;
La fatale et brûlante ferraille
Est venue se loger, acier bleui
Au cœur même de mes entrailles
Au plus profond de mes chairs transies.


Des ronces acérées dans mes veines,
Du verre pilé sous mes paupières
Et dans les poings qu’en vain je serre ;
Des Enfers la douleur est la reine
Et le temps même semble ployer
Sous son joug à nul autre pareil.
La nuit paraît une éternité
A la souffrance qui s’éveille…


Sous les astres pâles et anonymes
De tous, je reste le dernier
A encore gémir et grelotter
A encore rêver des abîmes.
La Mort pourtant rôde et tourne
Je l’appelle, l’implore, la supplie
Mais sans cesse Elle se détourne
Et reste insensible à mes cris.


Elle s’approche soudain, me dit :
« Homme, si tu n’as jamais aimé
Alors tu n’as pas vécu, et sans vie
Que puis-je donc t’ôter ? »
La tête en arrière, je respire
L’air tiède de cette nuit d’été
Qui tout entier me fait frémir.
A cet instant, je me sens exister…



Puisqu’à cet instant précis
Viscéralement, j’aime la vie
Viens, ne me fais plus languir
Et laisse-moi enfin partir.