Pourquoi pas ? Dans le passé, sans remonter plus loin qu'au latin ou au français, l'humanité a été progressivement amenée à se passer de langues dominantes dans le rôle de langues internationales. Une étude très détaillée de Charles Xavier Durand, qui a vécu plus d'un quart de siècle aux EUA, au Canada, au Japon et au Vietnam, explique en détail, avec des faits précis et avec de nombreuses références, comment on en est arrivé à l'anglais "incontournable" : "Une colonie ordinaire au XXIe siècle"

(Éditions Modulaires Européennnes, EME, BE-Fernelmont). Sur plusieurs pages, notamment, 97, 258 à 260, il attire l'attention du lecteur sur l'espéranto. Il estime que l'espéranto mérite d'être pris en considération.

Par ailleurs, l'un des pays qui prêtent le plus d'attention à cette langue est précisément le plus peuplé du monde. La Chine. Radio Chine Internationale et le Centre d'Information Internet de Chine en font un usage régulier. Il n'y a pas d'obstacle à son enseignement. Il reçoit plus d'attention en Hongrie ou aux EUA qu'en France : il est admis au même niveau que les langues étrangères de grande diffusion dans les programmes hongrois d'enseignement, et un film documentaire paraîtra cette année aux EUA sous la signature de Sam Green : "Esperanto documentary: The Universal Language".

Et ceci alors que, le 23 novembre dernier, un livre de Nicholas Ostler est paru à Londres sous le titre "The Last Lingua Franca: English Until the Return of Babel" (La dernière Lingua Franca : l'anglais jusqu'au retour à Babel). "The Economist" en a donné une recension dans son numéro du 30 décembre 2010. Dix ans plus tôt, dans le numéro de novembre 2000 du mensuel étasunien "The Atlantic Monthly", un article de la journaliste Barbara Walraff parut sous le titre "What Global Language ?" (Quelle langue mondiale ?). L'auteure y exprimait déjà des doutes sur l'avenir de l'anglais. Il est vrai que ce n'est pas en lisant "Le Monde", longtemps dirigé par des anglolâtres tels que Jean-Marie Colombani ("Nous sommes tous Américains" et Alain Minc, qui ne voyait pas d'alternative à "la marche forcée vers l'anglais", qu'un citoyen peut découvrir les dessous de la politique linguistique mondiale.

Mais l'espéranto est surtout une langue libre, comme les logiciels du même nom. C'est vrai que Google a une interface en espéranto. Mais il existe des logiciels traduits en espéranto, par exemple OOo, Drupalo, Nisus, Mellel, PageSpinner, Python, auquel a contribué le professeur Bruce Arne Sherwood, ou même créés en espéranto, par exemple l'éditeur Java Unicode Simredo... Voir aussi le site "Best Freeware download" et une liste sur "Listo de esperantigitaj programaroj".
Sans moyens comparables avec ceux de Google pour son programme Translate (et même très très loin de là !) trois sites se sont lancés dans la traduction automatique incluant l'espéranto : Traduku.net, Apertium, GramTrans. Ce n'est pas si mal pour une langue si peu enseignée et ne disposant pour cela que de moyens humains et financiers insignifiants par rapport à ce qui est octroyé à tour de bras à l'anglais aux frais du contribuable non-anglophone.

La proposition de l'espéranto peut faire sourire, mais que les sceptiques veuillent bien étudier le rapport publié en 1922 par le secrétaire général adjoint de la SDN, le scientifique japonais Inazo Nitobe :



C'est le gouvernement français qui fit barrage à cette proposition. L'utilisation des locaux scolaires fut même interdite pour les cours d'espéranto... ce que fit aussi le régime nazi dans la décennie suivante.

C'est finalement une affaire de calcul : vu que la formation d'élèves et de professeurs à l'espéranto exige de huit à dix fois moins de temps que l'anglais, disons même cinq pour ne pas être vache, un grand pas serait accompli vers son usage mondial en une seule génération, et ceci sur des bases équitables, ce qui n'est absolument pas le cas avec l'anglais. Des pays comme les EUA et la Grande-Bretagne ont pour ainsi dire un monopole sur l'anglais. C'est leur marmite de potion magique. Il y a quelques similitudes entre ça et le jeu de Microsoft-Apple and Co. Tous les peuples non anglophones n'ont d'autre choix que celui de raquer, de sacrifier énormément d'argent et de temps sans chance réelle de parvenir à égalité lorsqu'il s'agit de négocier des contrats et des engagements sérieux.

Où sont l'équité et la démocratie dans ce jeu de dupes ?