"Le chat est un domestique infidèle qu'on ne garde que par nécessité pour l'opposer à un autre ennemi domestique encore plus incommode, et que l'on ne peut chasser. Nous ne comptons pas les gens qui, ayant le goût pour toutes les bêtes, n'élèvent des chats que pour s'en amuser : l'un est l'usage, l'autre l'abus. Et quoique ces animaux, surtout lorsqu'ils sont jeunes, aint de la gentillesse, ils ont en même temps une malice innée, un caractère faux, un naturel pervers, que l'âge augmente encore, et que l'éducation ne fait que masquer. De voleurs déterminés, ils deviennent, seulement lorsqu'ils sont bien élevés, souples et flatteurs comme les fripons. Ils ont la même adresse, la même subtilité, le même goût pour faire le mal, le même penchant à la petite rapine. Ils savent couvrir leur marche, dissimuler leur dessein, épier les occasions, attendre, choisir, saisir l'instant de faire leur coup, se dérober ensuite au châtiment, fuir et demeurer éloignés jusqu'à ce qu'on les rappelle. Ils prennent aisément des habitudes de société, mais jamais des moeurs. Ils n'ont que l'apparence de l'attachement : on le voit à leurs mouvements obliques, à leurs yeux équivoques ; ils ne regardent jamais en face la personne aimée. Soit défiance ou fausseté, ils prennent des détours pour en approcher, pour chercher des caresses auxquelles ils ne sont sensibles que pour le plaisir qu'elles leur font..."